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Un document produit par une instance régionale de promotion de la santé, en France, donne des repères pour mieux comprendre les liens entre inégalités environnementales et les inégalités sociales de santé.
© IREPS
Afin d’expliquer le concept d’inégalités environnementales en lien avec la santé, l’Instance régionale d’éducation et de promotion de la santé (IREPS) Auvergne-Rhône-Alpes vient de publier une fiche « Repères en prévention & promotion de la santé ». Ce document de six pages, richement référencé, commence par définir les inégalités environnementales, avant de proposer des pistes pour agir.
Il est notamment rappelé que les inégalités environnementales ne sont pas « une nouvelle sorte d’inégalités, « mais de la dimension environnementale des inégalités socioéconomiques » qui traversent la société à l’échelle d’un territoire, d’un pays et de la planète ». L’auteur de cette fiche mentionne également cinq domaines que touchent ces inégalités, parmi lesquels : L’exposition aux risques environnementaux, l’accès aux ressources naturelles et l’impact du mode de vie sur l’environnement.
(croc)
Ce livre s’adresse à toutes les personnes soucieuses de trouver quelques clés de compréhension pour penser la santé dans l’environnement et entamer une nécessaire transformation socioécologique des services de santé.
Ce livre s’adresse à toutes les personnes soucieuses de trouver quelques clés de compréhension pour penser la santé dans l’environnement et entamer une nécessaire transformation socioécologique des services de santé.
Par Jean Martin
« La question des liens entre santé et environnement nous renvoie à notre propre vulnérabilité » (François Gemenne, membre du GIEC, professeur à l’Institut d’études politiques de Paris et à l’Université de Liège, dans la préface).
Un ouvrage majeur en matière de santé environnementale ; Une somme imposante, qui traite de manière approfondie de dimensions toujours plus importantes dans la pratique des soins. Récemment paru, Santé et environnement — Vers une nouvelle approche globale s’arrête sur ces aspects qui doivent aussi intégrer l'enseignement des professions de la santé.
Cette publication collective met en lumière les relations entre médecine/système de santé et le milieu dans ses multiples facettes, notamment en rapport avec les impacts sur la santé du dérèglement climatique et de la chute de la biodiversité, qui accroissent fortement notre vulnérabilité. La santé humaine dépend de la santé des écosystèmes, on le sait bien maintenant — c’est « l’interdépendance du vivant ».
Le patron de l'entreprise, Nicolas Senn, est professeur et responsable de la formation en médecine de famille à Lausanne. Avec son équipe, il s'est investi pour conceptualiser et décrire les problématiques auxquelles il s'agit de faire face. Il a entre autres mené des recherches sur l’impact des cabinets médicaux en termes d’émissions de gaz à effet de serre. Pour réaliser cet ouvrage, ses trois collègues et lui-même ont rassemblé quelque septante autrices et auteurs suisses, français·es et quelques Anglo-saxon·ne·s d’horizons disciplinaires différents. Il en résulte plus de quarante chapitres regroupés en cinq grandes parties :
Parmi les sujets majeurs traités figurent l’importance de se référer au neuf limites planétaires, le modèle du donut de Kate Raworth qui veut trouver des solutions entre un plancher social de base à garantir et un plafond écologique à ne pas dépasser ou le concept de « One Health » (ou aussi « Planetary Health »), incluant les aspects sanitaires humains et animaux (zoonoses), de même que les questions sociales et économiques, formulées par notre compatriote Jakob Zinsstag. On y trouve aussi la mise en évidence de « La Grande Accélération », particulièrement manifeste depuis les années 1950, dont les multiples évidences ont été étudiées et popularisées par W. Steffen et coll. Les services écosystémiques, qui peuvent être définis comme « le bien-être fourni par la nature pour l’humain » - Nature's Contributions to People, voir p. 132 ss. ou les dangers croissants de la pollution de l’air et les risques toxicologiques, y compris l’écotoxicologie des médicaments, sont traités. Le sont également les questions d’écoanxiété ou solastalgie [1], de plus en plus présente, et d’autres aspects de santé mentale. Enfin, l’ouvrage porte sur les problématiques migratoires, les bénéfices liés à la mobilité active, à l’alimentation, au contact régulier avec la nature, ainsi que sur la science de la durabilité dans les services de santé.
Devant le défi climatique, il importe que la médecine et le système de santé assument leurs responsabilités de contribuer à des pratiques soutenables, donc de garder à l’esprit les exigences de sobriété, voire de frugalité. Cette posture demandera, à divers niveaux, de faire des choix non aisés. Santé et environnement apporte à cet égard des bases solides, avec une multiplicité d’éclairages et d’angles d’attaque. Un tel contenu doit aujourd’hui faire partie du bagage des étudiant·e·s en médecine et des professions soignantes, ainsi que de tous les jeunes professionnel·le·s (étant entendu que l’ouvrage apportera beaucoup aux collègues moins jeunes aussi !).
Dans leur introduction, les directeurs et directrices de publication relèvent que « ne pas considérer l’influence des déterminants environnementaux de la santé dans la prise en charge peut même être vu comme un manque de professionnalisme, tant les preuves de leur influence sont abondantes ». Plus généralement d’ailleurs — et c’est ce sur quoi insiste la dernière partie du livre —, il faut réaliser que la prise en compte de ces facteurs questionne le fonctionnement même d’un système de santé productiviste, organisé autour d’une approche trop strictement biomédicale.
[1] « La solastalgie est une détresse profonde causée par les changements perçus comme irréversibles de notre environnement. En évoluant dans un monde qui semble s'autodétruire, certaines personnes finissent par être envahies d'un sentiment d'impuissance étouffant. (...) En quelque sorte, on peut dire que la solastalgie est un stress pré-traumatique. Cette sensation accablante pousse à divers symptômes : tristesse, anxiété, insomnie, anorexie, dépression » (Futura-Sciences.com)
Sous la dir. de Nicolas Senn et al. «Santé et environnement — Vers une nouvelle approche globale», Chêne-Bourg/Genève: RMS Éditions, 2022, 502 pages
Un rapport français compare les approches de communication en santé environnementale en périnatalité de cinq pays ayant la réputation d’être précurseurs en matière de santé environnementale. La Suisse en fait partie.
Un rapport français compare les approches de communication en santé environnementale en périnatalité de cinq pays ayant la réputation d’être précurseurs en matière de santé environnementale. La Suisse en fait partie.
Des exemples concrets tirés du terrain destinés à inspirer d’autres démarches de prévention de santé publique en matière de périnatalité. Tel est le but d’un rapport réalisé en France par l’organisme Objectif santé environnementale. Pour ce faire, les actions de communication menées dans cinq pays ont été analysées.
Les expert·e·s ont ainsi examiné des actions issues d’Allemagne et de Suède, « deux pays européens historiquement très investis en matière de protection de l’environnement », du Canada et de la Suisse « deux pays hors-UE faisant des efforts dans le domaine de la santé environnementale », ainsi que du Japon, « pays asiatique ayant une démarche autour de la santé et du bien-être très élaborée, pragmatique et exhaustive ». Un des objectifs de cette étude était de déterminer si la communication en santé environnementale dans les cinq pays retenus pourrait être une source d'idées et une base de réflexion pour mieux informer, inciter à agir et promouvoir la culture en santé environnementale dans la population française, notamment auprès des futurs et jeunes parents.
Pour mener la recherche, les scientifiques ont analysé les actions qu’ils et elles ont réparties en onze catégories, telles que portails internet, hotlines, affiches publicitaires et expositions ou formations en ligne. A la suite de cette enquête, un top 10 des outils de communications potentiellement reproductibles et transposables en France a été compilé. Cette liste comprend notamment des actions d’affichage publicitaire en ville ou sur les bus, la labellisation de pharmacies « amies de bébés », les parents référents des quartiers et parrains / marraines des futurs et jeunes parents, ainsi que les ateliers papa / second parent.
Selon le rapport, « la Suisse est bien classée sur l’index de performance environnementale (EPI) ». Et de souligner l'influence du fédéralisme sur les campagnes de prévention : « Étant découpée en partie francophone et germanophone, avec aussi une forte implication des administrations des cantons, les actions mises en place sont souvent spécifiques à ces derniers et n’ont pas le même résultat que des directives nationales. A l’instar de l’Allemagne (étant un État fédéral), il n’y a pas qu’une seule approche définie par l’État, mais des approches très hétérogènes. » Puis de souligner l’engagement de notre pays en matière d’environnement : « Il est aussi important de noter que beaucoup d’actions sont moins visibles en Suisse, car la population est déjà sensibilisée, possédant une véritable culture générale en santé environnementale. En effet, la Suisse, comme l’Allemagne, a engagé des actions concrètes avec un pic d’actions il y a déjà plus de vingt ans, notamment à la suite du Sommet de la Terre de Rio, en 1992. »
Dans les actions menées en Suisse relevées par les expert·e·s figurent des fiches d’information créées par la Ligue contre le cancer, des campagnes de sensibilisation menées auprès du personnel des lieux de vie enfantine, ou encore l’application développée par la Fédération romande des consommateurs permettant de scanner les produits cosmétiques pour en connaître la composition.
(croc)
Ragnar Weissmann et al., «Approches de communication en santé environnementale dans cinq pays — femmes enceintes et petite enfance». France, 2021, 17 pages
Coïncidences trompeuses, biais de confirmation, stéréotypes influencent nos jugements et décisions. Pascal Wagner-Egger, enseignant en psychologie sociale et en statistiques à Fribourg, explique comment déjouer ces mécanismes.
Pascal Wagner-Egger © David Marchon
(Reiso) Dans votre livre, « Méfiez-vous de votre cerveau », vous passez en revue trente biais cognitifs qui faussent notre jugement. Que sont-ils et à quoi sont-ils dus ?
(Pascal Wagner-Egger) Les biais cognitifs sont des erreurs de jugement commis par notre cerveau ou nos comportements sociaux. L’hypothèse est que l’évolution a mis en place un système de pensée intuitif et rapide assurant la survie de l’organisme qui engendrerait ces biais cognitifs et sociaux. Celui de la corrélation illusoire, par exemple, crée un lien entre deux évènements qui se sont produits par simple coïncidence. Si vous êtes insomniaque à plusieurs reprises pendant la pleine lune, vous allez être tenté·e d’attribuer votre mauvais sommeil à cette phase lunaire. Cependant, les fois où vous ne dormez pas et qu’il fait nuit noire, vous n’allez pas penser : « Quelle belle absence de pleine lune ce soir ! », et n’allez pas non plus vous rappeler des nuits — avec ou sans pleine lune — pendant lesquelles vous ne vous êtes pas réveillé·e. Pour savoir si la présence de la lune influence le sommeil, il faudrait faire de longues et difficiles études scientifiques (lesquelles montrent que les phases de la lune n’ont pas d’effet sur le sommeil).
De par notre cerveau « archaïque », sommes-nous destiné·e·s à être victimes de ces biais ?
Non, car nous pouvons lutter mentalement pour ne pas tomber dans le panneau. Le système de pensée rapide n’est pas le seul que nous avons. Nous disposons aussi d’un esprit critique, d’une pensée scientifique. Nous pouvons plus facilement inhiber ces biais cognitifs lorsque nous les connaissons et savons ainsi les reconnaître. Cela étant, tous les biais cognitifs ne sont pas négatifs, certains peuvent avoir une utilité. L’effet placebo est un bon exemple.
Ces erreurs de jugement peuvent-elles être dangereuses ?
Lorsque certaines personnes utilisent les biais cognitifs pour manipuler autrui, oui. Les gourous des sectes savent bien les combiner. Par exemple, le biais de supériorité illusoire peut être utilisé avec des adeptes en devenir. Leur faire croire qu’ils·elles sont à haut potentiel, mais que leur famille les a dénigré·e·s est un bon moyen de les rallier à la cause. L’effet de conformisme porte également ses fruits dans un tel contexte. Chaque adepte va être poussé·e à ressembler aux autres en gommant son individualité, et à accepter comme les autres les dogmes du·gourou. Le récent drame de Montreux, où une famille entière s’est défenestrée et tuée, est un triste exemple du pouvoir des biais cognitifs et des croyances…
Dans un autre contexte, l’escalade d’engagement peut ruiner quelqu’un·e. Ce processus social et cognitif pousse une personne à des comportements de plus en plus extrêmes, comme celui de jouer à un jeu d’argent des sommes de plus en plus fortes afin de « se refaire ».
(Propos recueillis par Yseult Théraulaz)
Méfiez-vous de votre cerveau, Gilles Bellevaut et Pascal Wagner-Egger, Editions 41, 2022, 152 pages
Un document rédigé par des spécialistes de la santé au Canada éclaire comment une approche intersectionnelle permet d'établir des programmes de santé publique efficaces, qui biffent les iniquités.
L’intersectionnalité, c’est quoi ? Ce terme, peu connu du grand public, est expliqué dans un document créé par le Centre de collaboration nationale des déterminants de la santé canadien qui regroupe des expert·e·s du domaine de la santé publique et des discriminations.
On peut y lire : « L’intersectionnalité renvoie à un concept, à un cadre, à une approche, à une méthode analytique ou à un mouvement servant à mettre en évidence l’injustice sociale et à prendre des mesures pour y remédier. Une approche intersectionnelle de la santé publique repose sur la reconnaissance de la complexité́ et de la diversité́ de l’expérience humaine. Elle nous aide à considérer les manières dont s’entrecroisent les systèmes de pouvoir et d’oppression comme le racisme, le classisme et le sexisme. Elle jette une lumière sur l’influence de ces systèmes sur la santé et le bien-être des individus, une influence exercée différemment selon la position sociale et l’identité́ sociale, comme le genre, la race et la classe, et qui diffère et se chevauche pour chaque personne. »
En d’autres termes, les iniquités augmentent encore lorsque les différentes formes de discriminations interagissent entre elles. Le document donne l’exemple des femmes noires du Canada pour lesquelles l’effet du racisme et du sexisme les rend particulièrement vulnérables au VIH : « En santé publique, une intervention intersectionnelle viserait par conséquent à agir sur l’ensemble de ces nombreuses formes d’oppression et des interconnexions sous- jacentes, non pas sur chacune isolément. »
Le document fourni des pistes pour une meilleur évaluation des situations et ainsi une meilleure orientation des interventions.
(YT)
Centre de collaboration nationale des déterminants de la santé. « Intersectionnalité: Parlons-en ». Antigonish (NS): CCNDS, Université St. Francis Xavier, 2022, 15 pages
Un groupe de sept associations belges abordent les questions liées au sexe, aux drogues et au respect dans une série de documents audio intéressants.
C’est quoi le consentement ? Peut-on être consentant·e malgré la consommation de substances psychotropes ? Comment se faire respecter en soirée ? Ces questions et bien d’autres sont abordées dans une série de podcasts réalisées par le groupe de travail belge baptisé « Sexe, drogues et consentement » qui réunit sept associations actives dans ce domaine.
Les trois épisodes audio — un sur le consentement, un sur les limites, un sur la communication — donnent la parole à des jeunes. Sans tabou, ils et elles parlent de leurs expériences, bonnes ou mauvaises. Ils et elles parlent de leurs propres limites, de comment les faire respecter et comment être attentif·ve aux limites des autres. Ainsi, une jeune femme explique qu’elle n’a pas insisté lorsque son copain lui a dit qu’il n’avait pas envie d’un rapport sexuel. « Il était choqué que j’accepte son non ! Son ex-copine lui aurait fait une scène m’a-t-il dit ! »
Les podcasts regorgent d’information, de définition, d’explications sur ces questions parfois encore taboues tout en laissant parler les jeunes avec leur langage fleuri et leurs expériences variées.
(Yseult Théraulaz)