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Youri Messen-Jaschin, artiste d’Op art, a mené une étude avec le laboratoire de neurosciences du CHUV pour savoir si ses toiles pouvaient réellement apaiser les personnes qui les contemplent. Rencontre dans son appartement-atelier.
© Noura Gauper
L’art optique peut-il soulager, voire guérir certaines maladies psychiques ? Cette question attise la curiosité de l’artiste suisse Youri Messen-Jaschin depuis qu’il a constaté les symptômes plus ou moins violents — tels que vertiges, migraines ou mal de mer — produits par ses œuvres chez certains individus.
Né aux Grisons, l’artiste signe L’Op art rencontre les neurosciences, un ouvrage paru aux Éditions Favre, dans lequel il présente ses œuvres et raconte l’aventure d’une recherche scientifique hors du commun.
(REISO) Cela fait plus de soixante ans que vous créez des œuvres d’Op art, à savoir l’art optique. Vos toiles dissimulent des illusions d’optique qui ne laissent pas indifférent·e·s les spectateur·trice·s. Comment vous est venue l’idée de frapper à la porte du CHUV pour proposer une recherche sur les effets neurologiques de vos créations ?
(Youri Messen-Jaschin) L’Op art est un mouvement qui se base sur les mathématiques. C’est donc un art particulier. Je dois calculer chaque épaisseur de ligne pour parvenir à créer des illusions d’optique. J’ai naturellement toujours collaboré avec des scientifiques, surtout aux États-Unis où la frontière entre le monde de l’art et celui des sciences n’existe pas de façon aussi nette qu’en Suisse. Plusieurs personnes m’ont fait part, au fil des ans, d’un bien-être ressenti après avoir contemplé l’une de mes toiles. Certaines d’entre elles, très stressées, repartaient apaisées après avoir passé une heure devant un tableau. Je me suis donc demandé si mon travail pouvait concrètement être bénéfique pour la santé et j’ai tenté ma chance au CHUV. Cela n’a pas été simple de convaincre les scientifiques, mais le Professeur Bogdan Draganski, directeur du laboratoire en neuro-imagerie, s’est intéressé à mes observations. C’est ainsi qu’a débuté le Brain Project en 2014.
Qu’est-ce que les chercheur·euse·s ont découvert ?
En faisant passer des IRM fonctionnelles [1] à des personnes d’âges différents et ayant ou pas des problèmes neurologiques, l’équipe du Prof. Draganski a tout d’abord repéré les zones du cerveau qui s’activent lors de l’observation d’une illusion d’optique. C’était le premier objectif du projet. Les scientifiques ont alors découvert que les zones activées ne sont pas uniquement les aires visuelles, mais aussi celle fronto-pariétale qui module notre attention. C’est un début de piste qui pourrait expliquer pourquoi des personnes ressentent un certain bien-être en regardant mes toiles alors que d’autres, les hypersensibles, peuvent être gênées. En complément aux IRM, j’ai proposé aux cobayes de répondre à un questionnaire pour connaître leur ressenti.
Qu’avez-vous obtenu comme réponses ?
Parmi les symptômes décrits par les participant·e·s à l’étude, il y a des migraines, des vertiges, des palpitations, voire la chair de poule. Cependant, ces effets secondaires touchent très peu d’individus. Lors d’une de mes expositions réalisées dans un musée, par exemple, seuls environ 2% des 3’400 visiteur·euse·s ont admis avoir été gêné·e·s.
© Youri Messen
Au-delà de ces quelques personnes qui réagissent avec des maux divers, qu’avez-vous constaté chez la grande majorité de celles et ceux qui observent vos créations ?
Un sentiment de calme, d’apaisement, de bien-être que je décris dans mon dernier livre [2]. J’ai eu tellement de retours positifs de personnes du monde entier que j’aimerais que l’Op art puisse devenir une thérapie naturelle pour aider notamment les personnes qui souffrent de la maladie d’Alzheimer, de Parkinson ou de dépression à retrouver un certain équilibre sans prendre de neuroleptiques.
Avez-vous d’autres projets en cours en lien avec les neurosciences ?
Oui, je suis en train de chercher des fonds pour faire développer un logiciel pour smartphone ou tablette qui proposerait des œuvres de Op art déstructurées, vectorisées en des milliers d’images. Chacune d’elle aura un algorithme précis. Un important mécène soutient déjà cette recherche financièrement, mais le montant alloué ne suffit pour un projet de deux ans.
Quelle est la finalité de ce logiciel ?
Grâce aux milliers d’images déstructurées, l’utilisateur·trice pourrait composer l’œuvre idéale lui permettant de se sentir bien. La caméra du téléphone portable mesurerait la dilatation des pupilles, alors que le bouton d’allumage prendrait les pulsations. Par la pupille et les pulsations, l’image pourrait aussi se transformer. On saurait, par cette image transformée, comment se sent la personne qui regarde cette toile digitale idéale. Ce serait merveilleux de pouvoir proposer un outil de bien-être via un téléphone. On pourrait aussi intégrer ce logiciel aux affiches vidéo que l’on trouve dans les gares de métro et dans la rue.
Mais comment faire avec celles et ceux qui réagissent négativement et fortement à la visualisation d’illusions d’optique ?
Les effets secondaires qu’ils et elles ressentent sont positifs malgré tout, car ils les aident à faire connaissance avec leur corps et ainsi de chercher à retrouver leur équilibre. Il est vrai que les scientifiques sont troublé·e·s de constater qu’une même toile peut susciter du bien-être chez certain·e·s et des maux chez d’autres. D’où l’intérêt de poursuivre des recherches dans ce domaine passionnant.
(Propos recueillis par Yseult Théraulaz)
[1] Les IRM fonctionnelles sont sensibles à la consommation d’oxygène du cerveau. Cela permet de savoir quelles régions cérébrales sont actives pendant une tâche qui sollicite le cerveau, ici la visualisation d’une œuvre d’Op art.
[2] L’Op art rencontre les neurosciences, Youri Messen-Jaschin, Lausanne : Ed. Favre, 2021, 176 pages
Dix capsules, sous-titrées en sept langues, proposent un outil pédagogique ou clinique au sujet des parties intimes, de la sexualité, et du genre. But avoué : lutter contre les « croyances, les tabous et les méconnaissances ».
Dix capsules, sous-titrées en sept langues, proposent un outil pédagogique ou clinique au sujet des parties intimes, de la sexualité, et du genre. But avoué : lutter contre les « croyances, les tabous et les méconnaissances ».
capture d'écran / @Genitalia
Une série de dix capsules vidéo pédagogiques aborde l’anatomie et la physiologie des organes génitaux externes, les croyances, mythes et méconnaissances les concernant, ainsi que les impacts de ces derniers sur les pratiques chirurgicales de modifications génitales, consenties ou non. Quatre de ces capsules sont des vidéos d’animation, et six sont des témoignages.
Ces petits films ont pour but « de montrer la diversité des organes génitaux, les similitudes et les différences entre les pratiques de modification génitale et de donner accès à toutes et à tous à des informations correctes sur ces parties du corps si cachées et pourtant à la base du fonctionnement de nos sociétés », écrivait la sociologue de l'IUniversité de Neuchâtel Dina Bader lors de la présentation du projet, en 2021. Il s’agit ainsi de lutter contre les « croyances, les tabous et les méconnaissances » qui entourent les organes sexuels.
Sous-titrées en allemand, anglais, italien, somali, arabe, tigrinya, amharique, ces vidéos gratuites peuvent être utilisées dans un contexte pédagogique (cours, ateliers, formations), clinique (consultations), ou simplement pour obtenir des informations factuelles.
Le développement des vidéos s'est fait de manière collaborative, transculturelle et transgénérationelle. Des personnes intersexuées, transgenres et du grand public, ainsi que des communautés migrantes concernées par l’excision y ont contribué, avec l’appui d’une équipe académique interdisciplinaire.
(CROC avec Santé sexuelle suisse et UNIGE)
Trois questions à René Knüsel, professeur honoraire à la Faculté des sciences sociales et politiques de l’Université de Lausanne et auteur de Qui châtie bien…
© Nicole Chuard
(REISO) Votre livre [1] est un ensemble de textes écrits par des chercheur·euse·s et des praticien·ne·s sur la maltraitance des enfants et le contexte culturel qui détermine parfois le comportement des adultes. Pourquoi un tel recueil ?
(René Knüsel) Cet ouvrage répond à un besoin récurrent, identifié auprès des étudiant·e·s en formation continue, confronté·e·s à des déclarations de mauvais traitements relevant de contextes spécifiques. Ils et elles sont parfois démuni·e·s face à certaines façons d’éduquer.
Faites-vous référence aux différences culturelles ?
Oui, notamment. Une famille issue de la migration n’a pas les mêmes références en termes d’éducation qu’une autre qui a toujours vécu en Suisse. Le·la professionnel·le de l’enfance doit connaître le contexte culturel et chercher à comprendre les intentions des parents avant d’agir. Un parent qui dysfonctionne, mais qui est d’accord de se faire aider et de corriger sa façon d’agir, devrait pouvoir continuer à s’occuper de ses enfants. A contrario, un·e mineur·e dont la mère ou le père a une attitude intentionnellement préjudiciable et n’entend pas changer de comportement doit être éloigné du foyer familial. Les valeurs que la société attribue à l’éducation ont beaucoup évolué, tout comme la conception de la famille. Aujourd’hui, la prise de conscience est collective et la société comme les professionnel·le·s savent à quel point l’éducation joue un rôle crucial dans le développement de l’enfant.
Si certaines différences culturelles permettent d’expliquer les comportements maltraitants de parents, quelles réponses les services de protection de la jeunesse doivent-ils apporter ?
(René Knüsel) C’est effectivement un grand dilemme face auquel se trouvent confrontées les personnes en charge de protéger les mineurs. Il n’y a pas de solution toute faite et chaque situation doit faire l’objet d’une attention particulière. Il n’y a pas non plus de définition largement partagée de la maltraitance et une grande hétérogénéité imprègne en conséquence les réponses apportées. Les seuls mauvais traitements reconnus par tout le monde sont les abus sexuels. Mais comment évaluer l’aspect délétère de la violence conjugale sur les enfants qui en sont les témoins, comment reconnaître la violence psychologique, quelle réponse apporter aux multiples mauvais traitements possibles ? Dans tous ces cas de figure, le·la professionnel·le doit s’assurer que le développement du mineur n’est pas en péril. Ensuite, il lui faut statuer sur l’intentionnalité des parents : veulent-ils nuire à l’enfant, sont-ils capables de corriger leur comportement, entre autres questionnements. Aujourd’hui encore, nous avons une connaissance incomplète de la situation et les chiffres publiés sur les cas de maltraitance ne sont que la pointe de l’iceberg. Parfois plusieurs années s’écoulent entre le début d’un mauvais traitement et son signalement.
(YT)
[1] Qui châtie bien…mauvais traitements envers les enfants et contexte culturel, sous la direction de René Knüsel et Fabrice Brodard, Ed. Antipodes, 2021, 224 p.
Promotion Santé Suisse a élaboré un guide destiné à aider les professionnel·le·s à mieux accompagner l’entrée dans la parentalité des couples.
Chez plus de la moitié des parents, le bien-être psychique diminue significativement après la naissance. Les troubles psychiques comptent d’ailleurs parmi les complications de santé les plus courantes dans la transition vers la parentalité.
Fort de ce constat, Promotion Santé Suisse a publié un guide à l’intention des professionnel·le·s qui accompagnent les couples sur le point de devenir parents. Le but de ce document est de donner des pistes pour soutenir au mieux les futurs pères et mères dans leur santé psychique et la renforcer.
Comme tout un chacun, les jeunes parents ont besoin d’une bonne santé psychique pour prendre soin d’eux-mêmes et des autres. Lors de la transition vers la parentalité, celle-ci revêt d’ailleurs une importance particulière car elle constitue une base essentielle pour le développement sain du nouveau-né. Inversement, les troubles de la santé psychique pendant la grossesse et juste après la naissance peuvent avoir un impact négatif sur le développement du bébé et de toute la famille.
Quels sont les facteurs de protection et comment les promouvoir ? A l’inverse, quels sont les facteurs de risque et comment les contourner ? Comment aborder la thématique de la santé psychique avec les nouveaux parents ? Toutes ces questions et bien d’autres sont abordées dans cette brochure disponible gratuitement en ligne.
(YT)
Le philosophe français Laurent Ravez signe l’un des premiers livres en français dans un domaine particulièrement questionné par la pandémie. A mettre entre les mains de tou·te·s les professionnel·le·s de santé et des politiques.
Recension par Jean Martin
Laurent Ravez est un philosophe de l'Université de Namur, très actif en (bio)éthique. Il publie Introduction à l’éthique de la santé publique, un des premiers ouvrages en français dans le domaine traité, d'intérêt très actuel par temps de pandémie Covid.
Après avoir brossé un tableau de ce qu'est la santé publique, il consacre des pages nécessaires au thème fondamental des déterminants sociaux de la santé (p.79 ss.). Dans la foulée, il s’intéresse au scandale multidimensionnel de l’aggravation des inégalités dans le monde entier, au sein des pays et entre les pays (voir aussi « Maladies de la pauvreté » - dès p. 221).
Ravez discute les grandes théories éthiques : utilitarisme, déontologisme, éthique des droits humains, éthique minimaliste, communautariste, des vertus. Sa dernière partie traite de l'éthique dans le domaine des maladies infectieuses, sujet classique depuis des siècles. Si, dès les années 1980, tous les enjeux liés au VIH/sida ont été particulièrement marquants, c'est maintenant le Covid-19 qui est au cœur des réflexions en la matière. Il importe toutefois de se ne pas oublier d'autres défis contemporains de grande importance, tels que l’usage de substances, le tabac et l’alcool ou les dérèglements écologiques.
Au plus proche des événements actuels, le philosophe relève que : « La santé publique requière souvent des efforts collectifs qui risquent d'être perçus comme les avatars d'un paternalisme sanitaire » (p.75). Ou quand l’éthique sociale fait face à l’éthique individuelle… Le fait est que la légitimité du paternalisme (entendu ici en termes objectifs) reste un élément essentiel, qui soulève de nombreuses questions, telle que : quel droit d'interdire aux fumeurs de fumer dans certaines circonstances ? A cet égard, la démonstration des effets nuisibles du tabagisme passif a apporté un fort soutien à la prévention. Ravez poursuit : « Pourquoi interdit-on de rouler à moto sans casque ? Pour protéger des inconscients ? Pour éviter des frais à la communauté en cas d'accident ? Probablement. Mais ce genre de mesures coercitives pourraient également être le reflet d'une responsabilité morale collective d'éviter des souffrances et des décès » (p. 15). Et de relever que, bien entendu, si des moyens coercitifs doivent être envisagés, il s'agit de choisir les moins contraignants.
L'auteur souligne encore que, à côté de ses dimensions descriptives et de recherche à large échelle, la santé publique et son éthique ont vocation à défendre la cause d'une meilleure santé, de plaidoyer.
Cette Introduction à l’éthique de la santé publique est un livre bien informé, structuré, de lecture aisée. Il aborde l'essentiel de ce que les professionnel·le·s de santé, ainsi que leurs supérieur·e·s institutionnel·le·s et politiques, devraient savoir et comprendre. Tant il est vrai que, malgré le regain d'actualité que lui donne la pandémie, la santé publique et ses potentialités n'ont pas la place qu'elles requièrent.
« Introduction à l'éthique de la santé publique », Laurent Ravez, Montpellier : Ed. Sauramps Médical, 2020, 262 pages.
Les reports de traitements liés à la pandémie soulèvent des questions éthiques. L’Académie suisse des sciences médicales souhaite sensibiliser les professionnel·le·s de la santé et les autorités à cette problématique.
Dans des situations de pénurie exceptionnelle des ressources, il importe d’utiliser les ressources humaines et matérielles à disposition de manière à éviter le triage des patient·e·s pour les traitements indispensables à la survie, tels que les opérations urgentes ou les soins intensifs. Pour ce faire, les traitements planifiables sont reportés. Toutefois, comme le précisent les directives de l’Académie suisse des sciences médicales (ASSM), la postériorisation des traitements constitue, elle aussi, une forme de triage.
Plus cette situation se prolonge, plus il est difficile d’évaluer si les ressources disponibles doivent être affectées à des traitements de soins intensifs ou à des traitements planifiables mais urgents. La décision de reporter des traitements indiqués requiert une justification médico-éthique, car elle peut avoir de lourdes répercussions sur la santé des personnes concernées.
Indépendamment de la pandémie, la planification des traitements fait partie du quotidien des hôpitaux et des processus bien établis existent. En cas de pénurie exceptionnelle des ressources, il est particulièrement important que ces processus soient redéfinis de manière à ce que les principes de protection de la vie, en particulier ceux portant sur la qualité de vie acceptable, l’équité et la protection contre la discrimination, soient respectés, même dans une situation tendue.
Une postériorisation non coordonnée et non réfléchie risque d’aller à l’encontre du principe fondamental de l’équité. Des procédures équitables et transparentes sont nécessaires pour garantir que les traitements, dont le report réduit considérablement l'espérance de vie et/ou est lié à un risque d'atteinte grave à la santé, soient effectués en priorité.
Dans sa prise de position, la Commission centrale d’éthique (CCE) formule des principes éthiques et rappelle des critères procéduraux pour le report des traitements. Elle souhaite contribuer à une prise de conscience éthique et lancer un large débat sur cette thématique. La CCE est prête à apporter son expertise médico-éthique si les processus de postériorisation font l'objet d'une discussion approfondie dans les milieux spécialisés.
(Source : ASSM)
L’ouvrage « Finalités et usages de la formation professionnelle ? » propose un décryptage des enjeux politiques et économiques de la formation professionnelle, ainsi que de son rapport à l’emploi.
Quelles sont les attentes et les finalités d’une formation professionnelle de type CFC ? Quels sont ses écueils, quelles lignes de tension subsistent dans cette filière ? Ces questions, et bien d’autres, sont abordées dans l’ouvrage paru aux éditions Antipodes, Finalités et usages de la formation professionnelle.
S’inscrivant dans des contextes historiques et variés, les différents chapitres proposent des regards croisés et interdisciplinaires sur cette filière de formation. Ils passent en revue non seulement le modèle de CFC suisse, mais aussi le CAP (certificat d’aptitude professionnelle) et le BEP (brevet d’études professionnelles) français et encore le modèle espagnol.
Destiné aux chercheur·euse·s tout comme aux acteur·trice·s de terrain, le livre porte une attention particulière aux parcours de formation ainsi qu’aux rapports à l’emploi et à l’insertion.
(Source : éditions Antipodes)
« Finalités et usages de la formation professionnelle ; Apprendre un métier, trouver un emploi, poursuivre ses études ? », Nadia Lamamra, Morgane Kuehni et Séverine Rey (dir.), éditions Antipodes, 2021, 295 pages
A l’occasion de la Fête nationale indienne, la directrice de la HETS Genève, Joëlle Libois, a été récompensée pour son travail et ses publications en lien avec le pays d’Asie du Sud.
© HETS Genève
Le 26 janvier, à l'occasion de la célébration de la fête nationale indienne et du 75ème anniversaire de l'Indépendance de l'Inde, Joëlle Libois, directrice de la HETS Genève, a été honorée pour sa contribution et ses travaux en lien avec ce pays.
Au cours de la cérémonie, qui s'est déroulée à la India House à Chambésy en présence de représentants de la communauté indienne de Genève, Madame Libois a reçu un châle traditionnel des mains du représentant permanent de l'Inde auprès des Nations Unies à Genève, Indra Mani Pandey.
Passionnée par ce pays depuis de longues années, Joëlle Libois a notamment fondé en 1999 l'association Surya-Geneva, qui promeut des projets sociaux-éducatifs en Inde et encourage les échanges culturels entre l’Inde et la Suisse. En particulier, la structure Shantosha Nanban à Pondichéry accueille plus de soixante enfants orphelins ou abandonnés par leurs familles. Sans cette association reconnue par les autorités locales, ils ne pourraient que difficilement survivre aux très rudes conditions de vie de la rue.
Cette distinction coïncide avec la parution aux Editions ies du livre Présences de Tagore. Eveil au monde et action communautaire, dont Joëlle Libois est l'autrice. A l’aube de l’indépendance de l’Inde, Rabindranath Tagore, poète indien, s’est engagé à travers sa prose, l’éducation et l’action communautaire à soutenir les populations rurales les plus défavorisées.
Dépassant les frontières, refusant toutes les formes de discriminations, Tagore est un précurseur du travail social en Inde. Son approche à la fois poétique et virulente, locale et globale, artistique et socioéconomique nous entraîne dans des contrées peu connues, voire originales du travail social, qui s’articulent étonnamment aux enjeux actuels de la précarité, des discriminations, du repli sur soi, de la consommation effrénée.
(Source : HETS Genève)
Dans le livre Après moi..., l’autrice Daniela Ciccarone-Bianchi parle sans tabou de son cancer et de son combat de vingt ans contre cette maladie. Bouleversant, mais sans pathos.
Elle s’appelle Daniela Ciccarone-Bianchi et son premier cancer, logé dans son sein droit, lui a été diagnostiqué alors qu’elle n’avait que 37 ans. C’était en 2001. Cette épreuve a poussé cette infirmière à prendre la plume pour raconter son combat, ses moments de désarroi et de bonheur, sa vie bouleversée par ce diagnostic funeste.
Après moi... [1] est donc le témoignage de toutes ces années passées à lutter contre une maladie qui deviendra chronique. « …par nécessité, par besoin, j’ai pris la plume et j’ai entamé ce fameux carnet de route. Il a été pour moi une forme de psychanalyse, un baume contre les blessures du corps et de l’esprit », écrit Daniela Ciccarone-Bianchi.
Loin de plonger le·la lecteur·trice dans une récit funeste et empreint de pathos, l’ouvrage relate les états d’âme d’une femme à l’esprit vif et au moral d’acier. Il évoque les examens subis, les diagnostics annoncés, mais aussi tous ces moments qui rendent la vie belle et précieuse. L’autrice parle des repas de famille, des fous rires, mais aussi des traitements aux effet secondaires lourds, des antidépresseurs indispensables pour surmonter l’insurmontable. La présence d’un mari aimant et d’une famille unie ont permis à Daniela Ciccarone-Bianchi de garder optimiste et joie de vivre, même si certains moments de grands désarroi sont également racontés sans ambages.
Touchant, bouleversant et écrit sans chichi, Après-moi... reste un hymne à la vie, bien que son autrice soit décédée en octobre 2021, juste avant sa parution et un mois après la naissance de sa petite-fille.
(YT)
[1] « Après moi... », Daniela Ciccarone-Bianchi, Editions Favre, 232 pages
Un groupe d’expert·e·s français s’est penché sur l’impact négatif des images véhiculées sur internet. Il met en garde contre certaines dérives.
© deepkhicher / Pixabay
Un corps mince et musclé, tout le temps et à tout âge. Voilà ce que l’on trouve sur les réseaux sociaux, où le narcissisme des un·e·s et les connaissances de Photoshop des autres permettent de ne montrer que des images de silhouettes parfaites. Une sorte de norme à atteindre à tout prix, alors même qu’un grand nombre de photos sont trafiquées, retouchées, améliorées. Sur le net, rares sont en effet les star à publier des clichés d’elles au réveil (certaines l’ont fait toutefois, pour déjouer ce phénomène) et encore plus rares sont les quidam à afficher leurs pectoraux chancelants ou leurs fessiers mous.
Pourtant, le mythe au corps parfait adulé par Instagram et les autres médias ne reste pas sans conséquences. Un groupe d’expert·e·s français, parmi lesquel·le·s des professeur·e·s d’université en psychologie ou en comportement des consommations, s’est penché sur ce phénomène dangereux.[1] L’article qu’il a publié sur le site The Conversion explique : « De nombreux travaux ont montré que les médias traditionnels (…) véhiculent de fortes pressions incitant à essayer d’atteindre des idéaux corporels idéalisés et parfois irréalistes (…). Les images du corps qu’ils diffusent, inatteignables (…), mènent à l’internalisation de l’idéal mince et musclé (…). »
De ces idéaux découle une insatisfaction qui poussent certaines personnes à développer des troubles alimentaires ou des comportements excessifs. Cesser de manger, se nourrir de manière compulsive puis se faire vomir, se lancer sans préparation dans une activité physique soutenue sont autant de comportements néfastes pour la santé.
Et ce n’est pas tout, selon les expert·e·s : « L’insatisfaction corporelle peut aussi mener à des comportements à risques visant à modifier d’autres dimensions de l’apparence, en ayant recours par exemple à la chirurgie esthétique (peu soumise à la surveillance médicale), ou à des produits dangereux. »
Pour éviter de se laisser envahir par des images irréalistes, les experts recommandent de limiter l’exposition aux réseaux sociaux ou d’y chercher des contenus en lien avec des valeurs positives, telles que l’écologie ou la culture. Contourner les contenus affublés du fameux #summerbody, qui a fleuri au printemps passé, est aussi une façon simple de ne pas sombrer dans l’insatisfaction. Enfin, exercer sa pensée critique et surtout s’accepter tel que l’on est. Chaque individu a un corps qui lui est propre et qui, contrairement aux photos retouchées, est bien réel.
[1] Flaudias, Valentin et al. « Anorexie, boulimie… Comment les médias sociaux participent au développement de troubles alimentaires », The Conversation, publié le 14 octobre 2021
Trois questions à Francis Loser, enseignant-chercheur émérite à la Haute école en travail social à Genève et auteur de La médiation artistique en travail social. Enjeux et pratiques en atelier d'expression et de création
(REISO) Votre livre [1] est le fruit d’une recherche sur le terrain lors de trois types d’ateliers, un auprès de personnes aux prises avec des problèmes d’addiction à l’alcool, un avec des seniors et un dernier dans un centre de rencontre et d’expression créatrice. Il explique que la médiation n’est pas tant un outil thérapeutique, mais davantage une expérience esthétique. Qu’entendez-vous par là ?
(Francis Loser) De nos jours, on a tendance à penser qu’il faut guérir les personnes en souffrance et l’aspect thérapeutique de la médiation artistique prend le dessus. Lors de mes recherches, j’ai pu constater à quel point nous avons tous tendance à voir le monde de façon binaire : d’un côté le corps, de l’autre l’esprit ; d’un côté la nature, de l’autre la culture. Il faut cesser d’opposer le corps et l’esprit et revenir au sensible de la vie. La médiation artistique relève d’une expérience esthétique qui permet de concilier corps, émotions et cognition. Esthésie veut dire sentir. Les personnes qui souffrent, mais aussi les seniors se coupent souvent de leurs émotions et de leur sensibilité.
Selon vous, la maladie ne serait finalement qu’un blocage des émotions et sensations ?
Oui, en quelque sorte. Les personnes malades sont bloquées dans un processus de vie. Il faut alors leur permettre de se remettre en mouvement : déplier le corps, pour déplier l’esprit. La médiation artistique leur offre ainsi un chemin vers leur sensibilité. Il n’est pas utile de faire plein de projets pour se sentir vivant, il suffit de réintensifier la part de vivant qui sommeille en chacun de nous.
Comment des ateliers de création artistiques peuvent-ils aider à se reconnecter avec cette part de vivant ?
En créant quelque chose, la personne n’est pas uniquement spectatrice. Elle se laisse ainsi émerveiller par le produit qu’elle a fabriqué et découvre qu’elle possède des ressources dont elle n’avait pas forcément conscience. Par ailleurs, les participant·e·s de ces ateliers, bien que concentré·e·s sur ce qu’ils·elles font, partagent un moment agréable qui brise leur solitude. S’instaure alors un dialogue. La parole vient naturellement sans que cela tourne en interrogatoire comme cela peut arriver lors des entretiens. Ils·elles vivent une expérience globale, artistique, mais aussi thérapeutique, dans le sens de prendre soin de soi.
(YT)
[1] La médiation artistique en travail social, Enjeux et pratiques en atelier d’expression et de création, Francis Loser, Ed. Ies, 2021, 288 pages.
Cette dépendance touche de plus en plus de femmes, souvent davantage stigmatisées que les hommes. Un documentaire retrace le parcours de cinq personnes qui sont parvenues à s’en sortir.
capture d'écran © playRTS
Elles s’appellent Ariane, Stacy, Sylvie, Michèle, Isabelle et parlent à visage découvert de leur maladie, l’alcoolisme, dans un documentaire français diffusé sur la RTS. En Suisse, cette dépendance touche 15,9% de la population [1], dont 11,1% de femmes. Si les dommages pour la santé sont semblables que l’on soit un homme ou une femme, l’abus d’alcool ne se vit pas de la même façon pour les deux sexes.
Les témoignages recueillis dans le film « Alcool au féminin » [2] parlent de honte, de solitude, de consommation en cachette, de déni. Là où les hommes auront tendance à se laisser aller à trop boire avec leurs amis, lors de sorties ; les femmes se cachent, dissimulent.
L’alcool au féminin est encore tabou et le film cherche à le briser en donnant la parole à celles qui ont réussi à vaincre leur maladie. Ariane admet qu’elle planquait les bouteilles dans le landau de son enfant. Isabelle tricotait des pulls aux larges manches pour y dissimuler des flacons. Michèle, elle, évoque sa consommation de bière en pleine nuit, seule dans sa cuisine.
Le documentaire est entrecoupé d’échanges avec Fatma Bouvet de la Maisonneuve, psychiatre et addictologue. Les abus sexuels, les violences, les troubles alimentaires font partie des épreuves qui poussent souvent les femmes à tomber dans la dépendance à l’alcool. La médecin explique : « Le risque de devenir alcoolique est multiplié par 36 en cas d’agression sexuelle. » Le perfectionnisme, le sens du sacrifice sont des traits de caractères qui poussent également certaines à vider les bouteilles pour fuir le poids du quotidien. Comme l’explique Ariane : « Prendre de l’alcool me permettait de me mettre dans la ouate. »
Ces cinq femmes aux parcours très différents s’en sont sorties en prenant conscience du mal qu’elles s’infligeaient. Michèle s’est mise à bricoler plutôt que de picoler. Stacy a commencé le pole dance et a mis fin à une relation amoureuse toxique, Sylvie s’est engagée dans des associations d’aide et a renoué des liens solides avec son fils adoptif ; Isabelle « retricote sa vie, maille par maille »… Chacune a trouvé la force et le courage d’affronter la maladie et de retrouver le goût de la vie, bien loin de celui de l’éthanol.
(YT)
[1] https://www.bag.admin.ch/bag/fr/home/zahlen-und-statistiken/zahlen-fakten-zu-sucht/zahlen-fakten-zu-alkohol.html
L’ouvrage du psychiatre lausannois Nicolas de Coulon propose des stratégies d’interventions thérapeutiques lors de situations urgentes. La nouvelle édition est désormais disponible.
Comment intervenir lorsqu’un individu se trouve dans une situation de crise, un moment difficile qui rompt son équilibre psychique ? Quelle est la définition d’une telle crise ? Comment les équipes soignantes doivent-elles l’appréhender pour venir en aide aux patient·e·s ? Ce sont là quelques-unes des questions qui trouvent leurs réponses dans l’ouvrage du psychiatre lausannois Nicolas de Coulon : La crise, stratégies d’intervention thérapeutique en psychiatrie [1].
Cette nouvelle édition, revue et augmentée, s’adresse aux psychiatres, psychothérapeutes, infirmier·e·s en psychiatrie et aux différent·e·s soignant·s susceptibles d’intervenir en situations urgentes et lors de cas difficiles.
Ces moments de vie difficiles ne sont pas à considérer comme une fatalité. « Toute crise peut provoquer ou révéler un trouble psychique ; en même temps, elle indique des chemins de guérison. La crise psychologique offre ainsi une véritable opportunité de changement », peut-on lire dans l’ouvrage du psychiatre lausannois.
A travers des cas concrets, l’auteur explique les différentes étapes de prise en charge : de la prise de contact, au début de l’intervention, puis à l’organisation du traitement et à la fin de ce dernier. Il passe en revue différentes stratégies thérapeutiques : les approches corporelles, tels que les massages, la relaxation, les enveloppements humides ; le travail en équipe des soignant·e·s ; celui avec l’entourage ; entre autres.
Le livre de Nicolas de Coulon constitue un véritable manuel pour les soins psychiques aigus, proches de l’urgence.
(CP/YT)
[1] «La crise, stratégies d’intervention thérapeutique en psychiatrie», Nicolas de Coulon, Ed. Antipodes, 2021, 309 pages