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A côté du consentement sexuel, la redevabilité

Lundi 02.04.2018

Lorsqu’une plainte est déposée pour abus sexuel ou viol, la parole de l’un et la parole de l’autre se confrontent. Il est rare que le non-consentement soit établi, plus rare encore que le viol soit reconnu.

Sexe Relations ToiDans l’émission Forum sur RTS, Myrian Carbajal a introduit la notion de redevabilité. Au-delà de la question de l’âge de la majorité sexuelle (fixée à 16 ans en Suisse), la chercheuse, co-auteure de la recherche «Sexe, relations... et toi?» et professeure à la Haute école de travail social de Fribourg, estime en effet que la question de fond est celle de la définition du «consentement sexuel». Cette question exige des réponses plus complexes qu’un simple oui ou non car différentes motivations interviennent pour «consentir» à une relation. Ce verbe signifie d’ailleurs approuver, acquiescer, mais aussi concéder, se résigner. Il appartient donc au juge de tenir compte de l’environnement, des particularités des comportements sexuels des jeunes, des pressions sociales et des normes de genre qui influencent ces comportements.

La logique de la redevabilité est souvent à l’œuvre : une personne se sent redevable d’une autre parce qu’elle lui a offert une sortie en discothèque, un cadeau, un refuge dans une situation difficile, une écoute attentive lors d’un moment de doute ou de dépression. Cette redevabilité est étroitement liée aux normes de genre qui font que les jeunes hommes et les jeunes femmes n’ont pas la même place, les mêmes rôles ni les mêmes attentes concernant la sexualité.

Ces déséquilibres, souligne Myrian Carbajal, existent jusque dans les campagnes de prévention contre les violences sexuelles. Les affiches s’adressent uniquement aux femmes qui sont encouragées à être «responsables» et à dire non quand elles ne souhaitent pas une relation sexuelle. Cette injonction à la responsabilité concerne pourtant tout autant les hommes, grands absents de la prévention.

Au final, au lieu de décider si il y a eu «consentement» et si il y a eu «contrainte», il s’agirait pour les juges d’apprendre à décliner les réponses sur une échelle de la redevabilité avec une série d’échelons entre le «oui» et le «non».

Cette notion de redevabilité complète celle des rapports de pouvoir que les juges devraient aussi soigneusement investiguer dans les situations qui opposent un professeur et son élève, un chef et son employée, un directeur et une femme de ménage, un producteur de cinéma et une actrice.

Marylou Rey, rédactrice en chef de REISO


Présentation de l’étude
- Intervention à Forum 

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