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Former pour répondre à l’urgence écologique

Vendredi 22.12.2023
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À l’heure où les catastrophes climatiques se succèdent, de nouvelles vulnérabilités apparaissent pour les publics des professionnel·les du travail social, qui doivent dès lors être formé·es en matière d’enjeux écologiques. Grand angle.

Par Dominique Grandgeorge, formateur, auteur, master de sociologie, cadre de la fonction publique territoriale, France

« Il faut agir en homme de pensée et penser en homme d’action. (Henri Bergson).

I/ Écologisation des contenus de la formation du travail social

L’émergence empirique de la thématique

II/ Retours d’expériences

II/ 1 De quelques expériences pédagogiques suisses (et lyonnaises) au crédit de l’écologisation du travail social.

II/ 2 Former des assistant·e·s du service social en Alsace

Intégrer la question écologique dans le diagnostic géosocial

II/3 Bat'karé aux côtés des CESF à la Réunion

III/ Constat en forme de retour d’expérience

Conclusion

À partir de sa propre expérience, l’auteur de L’écologisation du travail social paru en 2022 aux éditions ies/Genève [1] illustre comment « la réformation des parcours de formation » se traduit dans les contenus pédagogiques et s’applique lors des enseignements qu’il délivre, dans l’espoir que le travail social prenne acte « du nouveau régime climatique { ...} dans l’Anthropocène [2] ».

Mots clé : double peine écologique et sociale ; Ecolonomie ; Filtre vert ; Travail social terrestre

En paraphrasant la célèbre phrase de Jacques Chirac prononcée en 2002 au Sommet de la terre de Johannesbourg, « notre maison brûle et nous regardons ailleurs », le climatologue François Gemenne note « que nous sommes encore en train de crier au feu, alors qu’il faut éteindre l’incendie... » (Sotto T, 2023). Aujourd’hui, alors que chaque jour apporte son lot de catastrophe météorologique, de record de températures, de chiffres effrayants sur l’état du vivant, rester indifférent·e, dans ses activités quotidiennes et professionnelles, aux enjeux écologiques et climatiques s’apparente à une forme d’irresponsabilité.

Si « nul n’est censé ignorer la loi, nul n’est censé ignorer les enjeux climatiques », selon Matthieu Orphelin, (2022). Il appartient dès lors à chacun·e de passer à l’action, d’affronter le feu et dans une perspective professionnelle, à réformer les programmes de formation du travail social.

I/ Écologisation des contenus de la formation du travail social

« Comment s’orienter » dans ce monde en mutation ? Suivons Bruno Latour, qui indique « où atterrir » (2017). Plutôt que d’interpréter les enjeux actuels comme une accumulation de crises (économique, démocratique, politique, écologique, éthique) orpheline d’un horizon commun, le philosophe, sociologue et anthropologue invite à relier trois phénomènes qui s’enchevêtrent et se complètent pour aider chacun·e à « s’orienter en politique ».

Premier phénomène : les effets pervers et négatifs de la mondialisation dérégulée au profit des classes dirigeantes mondiales (affaire, politique, etc.) ;

Deuxième élément : l’organisation planifiée et systématique du déni climatique et écologique au bénéfice de ces mêmes élites et leur inévitable corollaire ;

Troisième signe : l’explosion des inégalités étalant un différentiel vertigineux entre les très riches et le reste des populations. « Tout se passe comme si une partie importante des classes dirigeantes (ce qu’on appelle aujourd’hui de façon trop vague les « élites ») était arrivée à la conclusion qu’il n’y aurait plus assez de place sur terre pour elle et pour le reste de ses habitants » (Latour, B, 2017). Ainsi, à la vulnérabilité sociale, entendue comme le pendant individuel de l’insécurité collective des protections sociales (Castel R, 1995), se rajoutent dorénavant la vulnérabilité écologique (GIEC, 2022) et son exposition affligeant les populations paupérisées. C’est ce que l’on dénomme par « double peine » affectant le public prioritaire du travail social.

Dans son dernier rapport publié en 2022, le GIEC développe pour la première fois les notions de « risque d’exposition et de vulnérabilité climatique » aux dépens des populations humaines. D’après les auteurs et autrices du rapport, entre 3,3 et 3,6 milliards d’humains (sur 8) vivraient actuellement dans des conditions de forte exposition au risque climatique. Parmi celles-ci, les populations paupérisées occidentales résidentes dans des zones déjà lourdement affectées par le poids des crises sociales et économiques (habitat urbain périphérique, zone industrielle à risque environnemental, site insécurisé et difficilement accessible, etc.) sont également considérées comme vulnérables.

Quelques chiffres aident à cerner les enjeux : quand, durant la pandémie de Covid-19, 160 millions de personnes tombent dans la pauvreté, les dix milliardaires les plus riches du monde doublent leur fortune personnelle (Oxfam, 2023). Par ailleurs, on estime que le 1% des personnes les plus riches au monde émettraient autant de gaz à effet de serre que les 50% les plus pauvres de la planète (Chancel, 2022). En France, les cinq premières fortunes ont doublé leur richesse depuis le début de la pandémie. À elles seules, elles possèdent autant que les 40% de la population française la plus pauvre (Oxfam, 2023). Alors que l’empreinte carbone annuelle par Français·e se situe en moyenne à dix tonnes, celle des 10% les plus aisé·e·s s’élève à 25 tonnes... à l’autre bout de l’ascenseur social, la moyenne stagne à 5% pour la population la plus paupérisée, représentant 60% des Français·es. (Chancel, 2022).

Du point de vue de ces populations durement affectées, la « double peine » est vécue comme un puissant ressentiment à l’égard des catégories sociales favorisées à forte empreinte écologique. D’autant plus que ces dernières, en qualité d’entrepreneur de morale et de norme (Becker, H, 1985), imposent aux plus démuni·e·s nombre de taxes et autres obligations règlementaires. Ici, les analyses centrées sur les processus de « frustration relative et d’indignation morale » observés par les sociologues dans les quartiers de relégation (Dubet, Lapeyronnie, 1992) à la fin du siècle dernier retrouvent toute leur légitimité et force de démonstration. 

Comme l’écrit Myriam Klinger dans la préface de L’écologisation du travail social (Grandgeorge, D, 2022, p.16), « la vulnérabilité́ se décline au pluriel et interroge aussi bien les modalités de la vie sociale que les ressources de l’environnement. Caractérisée par l’état d’instabilité́ et d’insécurité, induit par le ressenti de la menace d’un péril imminent, la notion de vulnérabilité recouvre d’un même mot les fragilités de l’existence sur le plan biographique et le destin incertain au niveau planétaire. (...) L’écoanxiété et ses manifestations, auprès des plus jeunes en particulier, sont une des traductions parmi d’autres du sentiment de vulnérabilité qui arrime le sujet fragilisé à une perspective globale incertaine, voire potentiellement apocalyptique ».

Par ailleurs, on observe que les normes juridiques s’invitent de manière de plus en plus tangible dans les bureaux, les salles de classe et les cours de récréation des établissements sociaux et médico-sociaux. Difficile de trouver ne serait-ce qu’un instant dépourvu de réglementation spécifique, de procédure codifiée rappelant le vivant en déclin et le climat en surchauffe dans le quotidien d’un éducateur ou d’une éducatrice, d’un·e directeur·trice ou d’un·e assistant·e social·e.

Alimentation, patrimoine immobilier, mobilité, biodiversité, déchets, ressources humaines et formation du personnel : ce sont en effet autant de registres qui font l’objet d’instructions règlementaires et de contraintes quotidiennes au gré des textes législatifs qui s’amoncellent depuis la fin du siècle dernier. Aujourd’hui, les faits sont là, les enjeux écologiques et climatiques sont omniprésents.

L’émergence empirique de la thématique

Paradoxalement, la thématique reste encore souvent en friche dans l’enseignement et la formation en travail social. À tout le moins, on rajoute un « truc vert » (expression empruntée à Bruno Latour) déconnecté des contenus de formation, qui ne conduit qu’à « créer de la confusion en diffusant des injonctions paradoxales entre les cours restés inchangés et les nouvelles activités pédagogiques » (Guntzburger, Y, & Hadengue, M, 2022).

Isolé des cadres habituels de la formation initiale ou continue, le sujet se retrouve ici cantonné pour une journée interfilière [3], thématique [4] ou de rentrée scolaire [5]. Là, il est traité dans le cadre d’un séminaire thématique déployé sur plusieurs jours [6]. Plus rarement, l’initiative s’appuie sur un colloque expressément consacré à ces enjeux [7], sur le mode de la conférence ad hoc [8], ou alors s’en tient à une filière [9].

Encore isolé en France, l’Institut régional du travail social (IRTS) de la Réunion intégrait durant l’année scolaire 2022-23 les enjeux écologiques et climatiques dans l’ensemble de ses filières, à l’exception de l’encadrement : moniteur·trice éducateur·trice (deux demi-journées annuelles), éducateur·trice spécialisé·e et de jeunes enfants (une demi-journée), ainsi que les filières de l’antenne locale de Mayotte qui ne dérogent pas à la règle (deux journées à l’endroit de la promotion éducateur·trice spécialisé·e et des conseiller·e·s en économie sociale (CESF). Cette dernière filière se distingue particulièrement (lire le chapitre suivant), tout comme celle des assistant·e·s du service social (ASS) qui y consacre trois demi-journées en première année.

En l’absence d’inventaire précis, il s’avère impossible de mesurer précisément le volume des actions engagées en la matière par les instituts de formation, dans un contexte où aucune réglementation, pour l’heure, n’exige l’intégration de la question de la durabilité aux cursus de formation. Pour autant, on peut légitimement se poser la question de la place des enjeux écologiques et climatiques dans l’enseignement du travail social.

Dans la suite de cet article, l’auteur s’appuie sur ses expériences personnelles d’enseignant pour proposer une formalisation du contenu des modules de cours proposés à l’adresse des étudiant·e·s en formation de travailleur et travailleuses sociales (ASS et CESF), ainsi qu’un retour de ses expériences au contact des écoles en Suisse romande.

II/ Retours d’expériences

En France, c’est véritablement à l’École supérieure européenne de l’intervention sociale de Strasbourg et à l’IRTS de la Réunion qu’il a été possible d’éprouver une approche globale et systémique des enjeux écologiques et climatiques s’inscrivant dans la continuité pédagogique propre aux métiers concernés. Précisément, il s’agit du cursus des conseiller·e·s en économie sociale (CESF) d’une part et des assistant·e·s de service social (ASS) d’autre part. 

Si les deux métiers précités trouvaient une justification écologique dans leurs précédents référentiels respectifs de 2018 — aujourd’hui inexplicablement diluée au milieu de blocs de compétences —, ce n’était certainement pas dû au hasard. En effet, autant « l’écologie appliquée à la vie quotidienne et le développement durable » (CESF) que « la transition écologique et le développement durable » (ASS) abordés dans une dimension collective et à l’échelle territoriale coïncident aux attendus des fonctions professionnelles.

Quand bien même les différents engagements en Suisse de l’auteur [10] répondaient à une commande ponctuelle — le privant dès lors de la maitrise de l’architecture globale du cursus pédagogique —, il demeure que les dispositifs pédagogiques déployés par ses commanditaires suisses s’accordent avec sa propre démarche transversale et systémique précitée dans les deux écoles françaises.

Dans ces expériences pionnières de formation, étalées de 2020 jusqu’à aujourd’hui, les formes d’interventions (table ronde et séminaire) reposaient fondamentalement sur la matière et les contributions des étudiant·e·s dont on valorisait ainsi la participation active, mais aussi l’aptitude à discerner la complexité systémique des enjeux à partir des points de vue en surplomb [11].

II/ 1 De quelques expériences pédagogiques suisses (et lyonnaises) au crédit de l’écologisation du travail social.

L’invitation à enseigner de quelques collègues audacieux·ses et soucieux·ses de s’engager dans la transformation écologique de la formation s’est concrétisée parfois par des cours donnés par le soussigné seul [12], ou en binôme, notamment à la HETS [13]. Ce cadre pédagogique s’appuyait alors sur un format de type participatif privilégiant l’initiative des étudiant·e·s. Du « travail social à l’épreuve de la crise écologique et sociale » à Lyon, au « travail social et transition écologique » en Valais, jusqu’à Genève où la question de savoir si « le travail social doit s’engager dans l’écologie ? », rendez-vous était (enfin) pris avec l’anthropocène, dans le « Nouveau régime climatique », exploré avec brio par Bruno Latour (« face à Gaïa », « où atterrir ? »).

Dans ces espaces de formation, les étudiant·e·s, organisé·e·s sous forme de groupes en petit nombre, s’adressaient à leur(s) professeur(s) en qualité de « grand(s) témoin(s) », d’aucuns sous la forme d’une restitution orale structurée en amont et définie temporellement par les accompagnateurs et accompagnatrices pédagogiques, d’autres à la faveur d’échanges oraux du type question/réponse axés sur la compatibilité entre enjeux écologiques et missions du travail social.

Succédant au moment rituel de présentation des interlocuteurs·trices, les exposés des étudiant·e·s ont conduit avec rigueur — mais non sans humour — au cœur de l’enchevêtrement complexe qui caractérise la rencontre entre question écologique et question sociale. Chacun·e dans son rôle préétabli et volontairement choisi (qui de l’animateur·rice, qui de l’assistant·e, du rédacteur·trice, ou du présentateur·trice-télévisuel·le) contribuait de belle manière à imaginer et introduire l’écologie dans le quotidien des professionnel·le·s du travailleur social. Emportés par la qualité et la dynamique générale des interventions et interrogations des étudiant·e·s, le chemin a été débroussaillé pour s’orienter dans plusieurs directions : formation et contenus d’enseignements, leviers d’action mobilisateurs ou, valeurs portant notre engagement écologique. 

Inévitablement, le cheminement des échanges a conduit à aborder les liens entre facteurs d’inégalité sociale et facteurs d’injustice climatique. Comment l’exposition au risque climatique et ses manifestations météorologiques extrêmes (cyclone, tornade, inondation, canicule, mégafeux, sécheresse) se traduisent-elles (et se distinguent) dans les appartenances sociales, l’ethnicité des groupes sociaux, les mondes professionnels, les milieux habités et anthropiques, aux différents âges de la vie ? Le constat est clair : la « double peine » (sociale et écologique) au détriment des classes défavorisées s’étend dans les quartiers populaires sans discernement. Si ces individus subissaient déjà la sobriété (cela s’appelle pauvreté), elles se retrouvent dorénavant exposées aux risques et excès météorologiques en situation de vulnérabilité climatique (cf. dernier rapport du GIEC 2022).

De s’être alimenté·e·s de supports littéraires (articles, extraits de livres), de s’être nourri·e·s des expériences personnelles et professionnelles significatives, de s’être appuyé·e·s sur un format pédagogique et collectif structuré et prédéterminé par les formateurs et formatrices, les étudiant·e·s ont démontré leurs qualifications sur ces enjeux prioritaires lors des restitutions collectives. Ils et elles y ont en effet multiplié les points de vue, tout en englobant la variété des problématiques soulevées par les enjeux écoclimatiques. Autant de questions soulevées et de pensées élaborées et argumentées avec justesse et complexité : autant dire que du côté enseignant, l’aventure s’est révélée réjouissante !

À bien y réfléchir, dans ce cheminement pédagogique en friche à l’aspect de « tiers paysage » en libre évolution (cf. index et lexique), ne serait-il pas plus convaincant de renverser la proposition initiale ? À savoir, s’interroger de comment les enjeux écologiques et climatiques doivent mobiliser et réformer le travail social, plutôt que de partir du point de vue professionnel « socialo-centré » ?

Cette démarche passe nécessairement par une adaptation réformatrice des formations, ainsi que l’expliquent les auteurs et autrice de l’article « L’environnement du travail social : enjeux pour la formation et la pratique face à la crise climatique ». Tristan Loloum, Marion Repetti et Alexandre Santos (2022) y rapportent deux façons d’introduire la question écologique dans le cours de la formation de travailleur·se social·e. La première approche, expliquent-ils et elle, « relève de (...) l’approche transformative, consistant à « faire infuser » les questions environnementales dans le « sens commun » des étudiant·e·s, à inséminer un « regard écosocial » à travers l’introduction d’études de cas, de lectures et de données sur la justice climatique, les inégalités environnementales et les risques socioécologiques dans les différents cours et à toutes les étapes du cursus. Cette approche transformative repose également sur l’implication des étudiant·e·s et des enseignant·e·s dans des actions de durabilité sur les campus des Hautes écoles. (…).

La seconde approche, qualifiée « d’intégrative », consiste à intégrer la thématique environnementale dans les cursus à travers des cours et options spécifiques. Cela peut se faire par exemple dans le cadre de modules sur la justice environnementale, le développement durable ou l’éducation à la nature (…) ... »

Finalement, c’est bien cette tension entre les deux approches qui articulera l’argumentaire pédagogique à l’épreuve de la programmation et de l’enseignement effectués au service des étudiant·e·s de deux structures françaises [14].

II/ 2 Former des assistant·e·s du service social en Alsace

Arrêtons-nous maintenant dans le parcours de formation des assistant·e·s de service social (ASS) en troisième année de formation à Strasbourg [15]. Durant l’année scolaire 2022-2023, huit demi-journées au total ont été attribuées aux enjeux écologiques pour la session intitulée « les enjeux du développement durable ».

Le canevas pédagogique construit pour cet enseignement se divise en plusieurs phases. La sensibilisation, sous forme d’une généalogie de la prise de conscience des enjeux écologiques et climatiques, constitue l’entrée en matière. Elle vise à permettre de comprendre, à travers une démonstration en entonnoir, pourquoi, comment, quand et de quelle façon le « concernement » (la prise en considération) s’insinue dans les instances internationales, se décline sur le plan national, jusqu’à ruisseler aux échelles régionales et locales avant de se conclure à notre une portée sectorielle.

Pour rendre compte des faits dans une dimension historique et sociologique, une stratégie pédagogique est développée par étape et repose dans un premier temps sur les principes du développement durable. En toute logique, on poursuit le parcours pédagogique en abordant la notion de transition écologique émergeant au début du XXIe siècle. Celle-ci est indissociable de la transition énergétique qui va s’imposer dans les milieux technocratiques et administratifs. L’approche globale à travers l’écologisation systémique, qui fait l’objet de toute notre attention, est présentée en conclusion.

S’ensuivent alors les travaux dirigés qui se décomposent en deux temps :

Sur le modèle des ateliers de transition écologique et le format d’exercice en petit groupe (famille zéro déchet, conversation carbone, défi biodiversité, etc.), les ateliers pratiques reposent sur des mises en situation vraisemblables en poste face aux usager·e·s, tels que l’organisation d’ateliers de fabrication de produits ménagers et de sensibilisation aux écogestes, la mise en œuvre du revenu de transition écologique, l’organisation d’une stratégie de réduction des déchets au niveau d’un établissement, ou encore la réponse apportée face à l’écoanxiété.

Préalablement, il importe de préparer et de former les étudiant·e·s aux techniques méthodologiques de dynamique collective entrainant la mobilisation des participant·e·s. Pour ce faire, initiatives et projets pilotes font l’objet d’une description (vidéo, échange ou lecture) , ce qui débouche sur un débat entre apprenants jeunes ou avec l’enseignant·e.

Ces travaux dirigés ne sont rien sans la découverte et les visites sur le terrain (en présentiel ou distanciel). Les exemples d’établissements engagés, d’expériences remarquables, de projets écoresponsables dans une logique d’adaptation du secteur social aux enjeux écologiques et climatiques contribuent à rendre compte des transformations à l’œuvre au quotidien.

Face à l’obligation de faire des choix et, par conséquent, à éliminer de nombreuses thématiques (déchets ou mobilité par exemple), les enseignements ont été presque exclusivement concentrés sur la question de l’alimentation. En s’appuyant sur des expériences pilotes en termes d’autoconsommation et des projets alimentaires remarquables en matière d’autosuffisance territoriale, un fil (vert) a pu être tiré. Celui-ci a conduit jusqu’aux problématiques de justice sociale en matière d’inégal accès à l’alimentation saine, locale et durable, consubstantielle d’une logique d’autoconsommation et de dépendance territoriale et locale.

Inscrit dans le référentiel de formation des assistant·e·s de service social, le diagnostic social territorial constitue un outil incontournable au service des professionnel·le·s. Il consiste à identifier les grandes problématiques sociales traversant le public ciblé à l’échelle d’un périmètre territorial tel qu’un quartier ou un village. Cependant, à l’heure du « Nouveau régime climatique » et des mutations qui s’imposent (Latour, B, 2019), il devient inconcevable de continuer d’ignorer le facteur écologique et les conditions matérielles d’habitabilité qui en découlent dans la confection de ce dispositif d’identification et d’analyse relevant des missions professionnelles de l’assistant·e du service social.

Intégrer la question écologique dans le diagnostic géosocial

Se référant à Bruno Latour, le directeur général de l’UNIOPSS, dans une tribune titrée « Géo-social », exhorte à intégrer l’aspect écologique dans les représentations des inégalités. Dans cette logique, il invite à faire « preuve de géopathie » (empathie vis-à-vis de la Terre) face aux inégalités sociales (Volturie Jérôme, 2022) ». Cela suppose d’intégrer les phénomènes climatiques et écosystémiques qui impactent les publics ciblés dans le diagnostic.

C’est à la faveur d’une sortie qui couplait visite/découverte de musée (focus sur le développement urbain non maitrisé) puis terrain d’intervention (animation socio-éducative dans une zone périphérique urbaine), qu’il a été possible de légitimer l’élargissement de notre point de vue de travailleur·se social·e à la lumière des enjeux écologiques et climatiques et de ses manifestations sur le vivant et particulièrement les usager·e·s des services sociaux.

Du point de vue des apprenant·e·s, le défi éducatif est intimidant. Il s’agit ni plus ni moins de problématiser « comment permettre aux classes populaires de participer et de proposer leur propre vision de l’écologie ou leur propre récit de la transition écologique » (Granchamps L & Joli, R, 2023).

Plutôt que « de [les] déposséder de leur écologie sensible », Laurence Granchamps et Romane Joli (2023) observent comment les habitant·e·s des quartiers populaires « expriment un attachement au vivant et à une nature ordinaire (et comestible) ». Dès lors, il appartient aux travailleuses et travailleurs sociaux d’accorder la plus haute importance aux nombreuses formes « d’écologisation et de diffusion des pratiques » spontanées (jardinage, plantation et végétalisation informelles) pour les saisir comme autant d’opportunités dans notre l’enseignement auprès des étudiant·e·s.

II/3 Bat'karé aux côtés des CESF à la Réunion

Pour mieux saisir l’aspect précurseur de « réformation écologique » des parcours pédagogiques, projetons-nous dans l’Océan Indien auprès de la filière de conseiller·e en économie sociale et familiale (CESF) de l’IRTS. Comment « l’écologie appliquée au quotidien » (cf. Arrêté du référentiel de formation CESF 2018) se traduit-elle dans le parcours pédagogique proposé aux futur·e·s professionnel·le·s ?

En commun accord avec la responsable pédagogique de la filière CESF, il a été convenu d’octroyer une place déterminante aux enjeux écologiques et climatiques dans le parcours de formation. Ainsi, dix demi-journées sont entièrement consacrées aux enjeux d’adaptation imposés par le Nouveau régime climatique (cf. Bruno Latour). Quelque 35 heures [16], sur un parcours de formation fixé à 540 heures, se répartissent donc sous forme d’enseignement magistral, travaux dirigés, visites, échanges avec des témoins, jusqu’à conclure sur une journée de bilan reposant sur des exposés préparés en groupe. Bien évidemment, pour être à la hauteur des enjeux et leur faire front, il serait nécessaire d’aller encore plus loin et de procéder à un véritable filtre vert (Grandgeorge, D, 2023).

À l’opposé de l’enseignement en silo, le filtre vert traverse l’ensemble du parcours de formation. Dans l’idée de répondre aux multiples interrogations que pose l’anthropocène, il importe de démêler le fil pédagogique éco-climato-compatible avec le maintien de l’habitabilité et de la viabilité sur terre, et à plus forte raison dans notre cadre d’activité professionnelle. Pour ce faire, rien de mieux que de « démailler le filtre vert d’un parcours de formation, qui garantisse l’engagement écologique et le rappel aux valeurs supérieures de la pérennité de la vie sur terre comme condition sine qua non de la survie de l’espèce sapiens ainsi que de la plupart des vivants... » (Grandgeorge, D, 2023). En cela, l’expression du créole réunionnais « démailler » (les cheveux, la ligne de canne à pêche), antonyme de « mailler » (mêler ensemble, choses mélangées inextricablement), s’avère convaincante.

C’est bien ce que proposent Yoann Guntzburger et Marie Hadengue (2022) dans un article consacré aux enjeux de formation (toutes disciplines confondues) face à l’urgence écologique. Comme Tristan Loloum, Marion Repetti et Alexandre Santos (2022) cités préalablement, il et elle distinguent d’une part, l’approche « intégrative » qui se contente de « l’ajout d’un cours ou d’une session quand les programmes bien remplis le permettent » et, d’autre part, l’approche « transformative » qui réforme les programmes en profondeur. À leurs yeux, ce n’est qu’à ce prix que « chaque étudiant·e disposera des connaissances et les compétences nécessaires pour être acteurs responsables et engagé·e·s dans les transitions à venir, tant personnellement que professionnellement » (2022, octobre 10).

À l’égard de la démarche intégrative, citons l’exemple de la fresque du climat et ses multiples dérivés (fresque du facteur humain, de la biodiversité, de l’alimentation) dont l’usage inflationniste dans les écoles de formation est significatif. Le succès de l’entreprise de communication n’est plus à prouver : entreprises, collectivités, universités (Ott-J.F, 2022) s’arrachent les prestations des animateurs et animatrices des fresques dans le but de sensibiliser leurs effectifs et publics aux questions climatiques. On « fresque » jusque dans les lycées (Renaud, G, 2023), qu’ils soient engagés (E3D) ou non, dans les conseils municipaux de jeunes et les Maison des Jeunes et de la Culture (s. a. 2023).

À la Réunion en revanche, le chemin emprunté côte à côte (cadre pédagogique et vacataire expert) s’oriente sans ambiguïté vers ce « démaillage du filtre vert ». La qualité des travaux dirigés, la puissance des témoignages partagés, la profusion des interventions et des échanges, l’enthousiasme contagieux exprimé avec vitalité et humour lors des sorties de découverte ne laissent aucune ombre sur le tableau récapitulatif de cette session et l’objectif « transformatif » de la démarche pédagogique choisie.

Enjeux de justice sociale et de sécurité alimentaire, préparation d’ateliers de transition écologique (confection et réparation), échanges sur le terrain en présence de témoins professionnel·le·s, initiation à l’agroécologie (permaculture, biodynamie, agroforesterie), enseignement autour de thématiques spécifiques (déchet, alimentation), problématisation théorique de la consommation ostentatoire, mise en valeur de pratiques innovantes en matière de sobriété et d’antigaspillage, enseignements magistraux articulés autour des penseurs de l’écosophie sont autant d’aspects abordés et développés au fil des heures de cours.

Eu égard aux racines du métier et des fonctions historiques de la CESF, il semblait approprié de s’appuyer sur le levier budgétaire et économique. Pour rappel, le référentiel de formation de 2018 (cf. bibliographie) comprenait « l’écologie appliquée au quotidien ». À l’évidence, entre économie sociale et familiale et accomplissement professionnel des principes écologiques reposant sur le refus du gaspillage, il y a convergence. De suivre ce cheminement à la croisée de l’économie budgétaire (métier historique) et la sobriété écologique (adaptation du métier) a donc permis de caler une posture professionnelle aux accents « écolonomiques ».

 

Pour mieux comprendre ici cette notion d’écolonomie déjà développée dans « Écologisation du travail social » (Partie IV, chapitre II, pages 204-209) et empruntée à Emmanuel Druon (2016), l’idée consiste à inviter les apprenant·e·s à saisir l’alliance vertueuse entre écologie et économie, en s’appuyant sur des exemples remarquables, mais aussi sur leurs propres expériences et témoignages. À l’évidence, ces nouveaux usages reposant sur la circularité (réemploi, régénération ou autosuffisance) réduisent d’autant les dépenses budgétaires qu’ils neutralisent l’impact écologique.

Autoproduction vivrière, élevage, compostage, usage des communs, réparation du petit équipement, confection des produits ménagers et cosmétiques au quotidien, réduction de la consommation énergétique et hydrique, engagement actif des usagers ; tant de pratiques s’enroulant dans le cercle vertueux de l’écolonomie promue par Emmanuel Druon (2016).

Chef d’entreprise et acteur d’une expérimentation remarquable à l’échelle de son entreprise de production d’enveloppe, Emmanuel Druon livre dans son ouvrage le témoignage vivant « qu’il est plus économique de produire de façon écologique ». Il définit les contours de ce néologisme, emprunté à Corinne Lepage (2009), dans son livre éponyme : « réduire ou carrément inverser l’impact de l’activité sur l’environnement ; permettre de gagner de la productivité, car nous sommes en compétition avec de puissants concurrents » tout en « baissant, voire supprimant, la pénibilité ou la dangerosité des postes » (2016, page 21).

À l’expérience, on découvre que les initiatives écoresponsables qui refusent le tout jetable, la surconsommation et les pratiques à fort impact écologique s’accordent avec bonheur à la bonne gestion budgétaire. Être sobre collectivement, c’est gagnant sur tous les plans, économique, écologique et politique (Brice, B, 2022). « Rien ne se perd, tout se transforme » prophétisait depuis bien longtemps le sage Pierre Rabhi.

À la Réunion, la session de formation se clôt par des exercices à vocation d’évaluation reposant sur une mise en situation fictive (ici, l’établissement scolaire des étudiant·e·s). Préparées en amont, les questions traitées en sous-groupes ont fait l’objet d’une présentation à l’oral d’une grande maturité :

Quelles sont les activités de l’IRTS Réunion que je souhaiterais supprimer en raison de leurs impacts négatifs écologiques ?

Comment les contenus de cours viennent consolider ma posture de futur·e professionnel·le ?

Quels sont les moyens que je préconise pour accompagner les personnes concernées vers une transition/sobriété écologique digne et acceptable ?

À la lecture et l’écoute des retours d’épreuve, le diagnostic sur le niveau d’adaptation de l’IRTS aux enjeux écologiques et climatiques (point de départ commun) s’est avéré très stimulant pour les étudiant·e·s. Espérons que l’expérimentation (encore en friche) n’en restera pas là et pourra fertiliser le futur dans l’attente de beaux fruits à venir.

III/ Constat en forme de retour d’expérience

À partir de ces premières expériences d’enseignement apparaissent en filigrane quelques éléments à retenir. D’abord, le déroulement de la formation est rythmé par quatre étapes qui s’emboîtent dans une continuité pédagogique :

1) Étape de la sensibilisation :

De quoi est-il question ?

Sous quelle forme le concernement des enjeux écologiques-se manifeste-t-il aux différentes échelles (multilatérale, nationale, locale et métier) ?

Quand et de quelle manière le secteur de l’action sociale et médico-sociale s’est-il senti concerné à considérer les enjeux écologiques ?

Est-ce que le travail social est prêt à s’adapter et à se réformer ?

2) Étape de la découverte et de la pratique

Il s’agit de la mise en pratique en petits groupes (ateliers de transition écologique) qui repose sur deux mouvements intimement liés. Cette étape privilégie l’expressivité, la créativité et l’initiative de chacun dans un esprit d’entraide et de coopération. Elle repose, d’une part, sur la nécessaire familiarisation avec les techniques écolonomiques (maîtrise des usages favorisant la réduction du gaspillage et de la surconsommation, confection et réparation domestique, écogestes). D’autre part, elle exige la réalisation de travaux dirigés sous forme d’exercices et de jeux de rôles reposant sur des définitions de situations rencontrées dans l’exercice des fonctions professionnelles (ex : instruction du revenu de transition écologique (Swaton, S,2022) planification d’une politique de réduction et recyclage des déchets, projet d’écologisation du service, mobilisation professionnelle autour de l’augmentation de l’écoanxiété du public, etc.). Cette dynamique de groupe précède les visites/découverte sur le terrain.

3) Étape de l’approfondissement thématique

Après les visites et les rencontres de témoin, cette phase correspond à la phase d’exploration. On aborde plus précisément les aspects incontournables de la vie quotidienne en situation professionnelle : consommation énergétique et hydrique, politique d’achat, empreinte alimentaire, gestion des flux de déchets, stratégie de patrimoine, respect de la biodiversité ou encore participation des usager·e·s.

4) Étape de l’appropriation

Ce dernier moment passé ensemble est consacré précisément à la restitution des apprentissages, des découvertes et des expérimentations. Alors qu’en Europe méridionale, on frôle les 50 degrés Celsius à l’ombre [17] lors des saisons estivales, l’acquisition d’une solide « culture écologique » (Charbonnier, P, 2022) acclimatée aux spécificités du travail social n’est plus une option. Elle est la clé de voûte du quotidien du travail social. À l’instar de ce que nous propose Pierre Charbonnier, cette culture convoque l’ensemble des sciences de la terre (anthropologie, sociologie, histoire, géographie, économique, philosophie, technologie). Les outils de compréhension et de théorisation assimilés, les méthodologies ludiques et pratiques maitrisées, le moment est venu d’aborder et de développer la clé de voûte de l’action, le diagnostic géosocial. À la logique de « développement » (social, territorial, économique, durable), on s’attelle à réformer le diagnostic à partir du « point de vie »   et des conditions matérielles subies par les publics (habitabilités, dépendance territoriale, ressource de proximité).

Au regard de ces constats, on mesure comment l’absence quasi généralisée de prise en compte de ces questions dans les programmes pédagogiques des trois filières d’encadrement françaises (CAFDEIS, CAFERUIS, DEIS) s’avère consternante. D’autant qu’on sait que les directions constituent les principaux vecteurs et de mobilisation des personnels en faveur de la transformation écologique des équipements (Grandgeorge, D, 2022, partie IV, chapitre II, pages 193-198).

Ces expériences pionnières en la matière mettent donc en lumière l’importante diversité de l’implication des écoles, encore soient-elles concernées par les enjeux écologiques et climatiques. Ainsi, sous quel prétexte, interviendrait-on ici uniquement auprès de la filière ASS assistant·e du service social alors que là-bas, ce sont les cohortes moniteur·trice-éducateur·trice, voire éducateur·trice spécialisé·e qui sont concernées, et plus loin toutes les filières historiques ? Mystère...

En cela, l’engagement transversal (exception faite des encadrants) de l’IRTS de la Réunion reste bien isolé au milieu d’un océan qui ne fait pas de vagues. D’autant plus que cet enseignement reste largement ouvert à l’inédit, l’expérimentation et la participation des apprenant·e·s.

On rejoint là les préceptes du philosophe John Dewey (1859-1952) qui considérait l’éducation comme le fruit toujours renouvelé d’une expérience collective interactive (apprenant·e·s, éducateurs, éducatrices). Livré·e à son libre arbitre, l’étudiant·e découvre de manière empirique et apprend en observant, avant d’expérimenter personnellement. Le chemin se fait en marchant. En ouvrant la voie, l’enseignant·e fait œuvre de guide. C’est peu de dire combien cette philosophie de l’éducation s’accorde à merveille avec les pratiques quotidiennes et domestiques précitées.

À Genève (et dans une moindre mesure à la Réunion, cf. chapitre précédent) les étudiant·e·s sont mobilisé·e·s « comme force de proposition concrète sur les enjeux matériels d’adaptation aux enjeux écoclimatiques jusqu’à « formaliser au centre de nos plans de formation la question de l’écologie » en s’appuyant sur « ce qui se passe dans notre école, où une réflexion sur le développement durable a été entamée » (Michaud, S, 2022). Ainsi, une plateforme d’échanges a vu le jour en 2019, « composée d’un collectif bigarré d’étudiant·e·s et d’enseignant·e·s qui pense et agit autour de la thématique écologique » (Michaud, S, 2022) issue du séminaire sur à Genève.

De ce terreau germera l’association « La Graine ». Depuis septembre 2023, celle-ci anime « une rentrée Climat » ouverte à toutes et à tous en s’appuyant sur la fresque du climat (HETS, 2023). L’objectif consiste à encourager, dès la rentrée, les jeunes arrivant·e·s à faire le lien entre leur futur métier et les enjeux climatiques, et les préparer à l’accompagnement des populations affectées par « la double peine » (cf. chapitre précédent).  

Conclusion

Des premiers enseignements peuvent être tirés de ces expériences pilotes. En résumé, le fil conducteur de la programmation repose sur une variété et un continuum méthodologique de quatre phases abordées progressivement ou de front, c’est selon. Cela suppose, on l’aura compris, une approche systémique activant opportunément les leviers à disposition : consommation, déchet, mobilité, écosystème ou alimentation) à la faveur de l’engagement et de la participation des apprenant·e·s.

C’est à ce prix que le renouvellement des contenus de formation, autrement dit la « réformation du travail social » (Grandgeorge, D, 2022), pourra s’émanciper du travail social dans le monde d’avant. Comme nous le signifie avec humour Bruno Latour, « un jour, il faudra penser à quitter le XXe siècle », { …} ce qui suppose de ne pas s’obstiner « sur une définition appauvrie du social » et ne plus « considérer l’écologie comme extérieure » de notre champ de compétence.

Inclure l’écologie dans le modèle du travail social, c’est substituer « le monde où l’on vit (citoyen terrestre dans le Nouveau régime climatique) au monde dont on vit (consumérisme irraisonné) », dit Bruno Latour (2021) avec un sens certain de la formule. C’est passer de l’abondance mondialisée (occidentale) à la dépendance et l’autosuffisance territoriale. Et si nous le prenions au mot ? Et si nous nous posions « une seconde la question de ce dont nous dépendons pour subsister » ? (Latour, Bruno, 2022).

C’est bien le « Travailleur Social Terrestre » esquissé dans « Plaidoyer pour une écologisation de la formation au travail social » (Grandgeorge, D, 2023) qui se dessine à l’horizon. « Se considérant avant tout terrien, avant d’être humain », (Latour), ce·tte professionnel·le prend acte des limites planétaires, des nouvelles conditions matérielles d’existence avec pour enjeu les questions d’habitabilité et de viabilité dans le Nouveau régime climatique.

Alors, qu’attendons-nous ? Les propositions inscrites dans le livre blanc du travail social présentées à la fin de septembre 2023 pour application règlementaire en 2025 ? Leur accomplissement pratique par les établissements quelques années plus tard ? L’injonction de l’autorité de tutelle qui imposera en urgence un référentiel de formation mal ficelé ? On ne négocie pas avec le vivant [18] et le climat.

Que cet article reposant sur des expériences éprouvées et des données scientifiques objectivées puisse apporter sa pierre à l’édifice et contribuer à lever les blocages qui continuent à freiner l’arrivée du nouveau monde terrestre dans la formation au travail social. Gageons que le travail social va enfin faire siens les beaux mots de Bruno Latour : « avant tout, avant d’être humain, l’homme est terrien ».

Bibliographie

  • Arrêté du 22 août 2018 relatif au diplôme d’État de conseiller en économie sociale et familiale. Ce texte a fait l’objet de rectification en 2020 à la faveur de nouveaux blocs de compétences aux dépens des questions écologiques, dont les références sont tout bonnement éliminées du contenu du référentiel (exit les principes de transition écologiques et du développement durable !). 
  • Article non signé : (2023, Février, 24) « Le conseil municipal des enfants au secours du climat », journal l’Alsace, page 24.
  • Bat'karé : littéralement : Se balader. Vient de l’expression créole « battre le carré » désignant « le tour du propriétaire » effectué autour de « la plantation », parsemé des champs cultivés (le Karé) bornés aux angles par le « piédbwa » (généralement le bois de chandelle, espèce de dragonnier caractéristique de l’Ile de la Réunion). 
  • Becker, Howard S, (1985). « Outsider. Etude sociologique de la déviance ». Métailé. Paris.
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  • Castel, Robert, (1995). « Les métamorphoses de la question sociale : une chronique du salariat », Fayard, Paris.
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  • Coccia, Emanuele (2016). la vie des plantes. Une métaphysique du mélange, 2016, Bibliothèques Rivages. Paris.
  • Décret n° 2018-734 du 22 août 2018 relatif aux formations et diplômes du travail social modifié par l’arrêté du 10 mars 2020 définissant les blocs de compétences de certains diplômes du travail social et portant modification des arrêtés du 22 août 2018.
  • Charbonnier, Pierre (2022). « Culture écologique », Presse de Science Po. Paris.
  • Demorand, Nicolas, (2022, 7 Janvier). Entretien de 8 h 20 avec Bruno Latour [vidéo]. France Inter.
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Index/lexique

ANDICAT : association nationale des directeurs et cadres d’Esat

Anthropocène : ce terme désigne la nouvelle ère géologique dans laquelle la planète est rentrée et qui succède à celle de l’holocène (12'000 ans à aujourd’hui). Cette période se caractérise par l’influence dominante de l’homme l’humain et de ses activités (anthropiques) sur le cours de la vie sur terre au point d’en bouleverser l’évolution géologique (réchauffement climatique et effondrement de la biodiversité). Ce terme est utilisé au depuis le début des années 2000, en premier par le chercheur spécialiste de l’atmosphère et de l’ozone Paul Crutzen. Selon Michel Magny (L’anthropocène, PUF, 2021), cette nouvelle ère géologique s’enracine dans le souffle des révolutions industrielles alimentées par les énergies fossiles (charbon, gaz puis pétrole) au début du XIXème siècle. C’est lors du passage du Moyen âge aux Temps modernes, d’après Michel Magny, que l’on passe d’une économie de subsistance à une économie de croissance basée sur le surplus et la consommation. Cette économie magnifiée par le Produit Intérieur Brut (PIB) explose lors de « la grande accélération » de l’usage des énergies fossiles (période des grandes glorieuses s’étalant de la seconde guerre mondiale jusqu’au milieu des années soixante-dix). Il est établi que les effets et conséquences désastreuses de l’Anthropocène compromettent la pérennité́ du vivant (et notamment l’espèce humaine -homo sapiens —).

CAFDES : certificat d’aptitude aux fonctions de directeur d’établissement de service d’intervention sociale.

CAFERUIS : certificat d’aptitude aux fonctions d’encadrement et de responsable d’unité d’intervention sociale.

Club de Rome : par cette expression, on désigne un groupe de réflexion réunissant scientifiques (science de la terre, économistes), haut·e·s fonctionnaires et industriel·le·s de cinquante-deux pays dès 1968 autour des enjeux sociétaux et écologiques. Du nom du président du groupe, Dennis Meadows, « le rapport Meadows » constitue la première étude de notoriété multinationale qui met en exergue les menaces écologiques, économiques et démographiques auxquels doit se préparer l’humanité. À partir de 1972, ce rapport a été publié à plusieurs reprises sous le titre « lLes limites de la croissance dans un monde fini ». Celles-ci reposent sur cinq constats alarmants :

  1. L’accélération de l’industrialisation
  2. La croissance démographique de la population
  3. La persistance de la malnutrition mondiale
  4. L’épuisement des ressources naturelles non renouvelables
  5. La dégradation de l’environnement

Pour la première fois, on démontrait que le système économique actuelle ne pouvait continuer de croître indéfiniment dans un monde fini. Réactualisé régulièrement (1992, 2022), le constat est d’autant plus alarmant que rien ne vient contredire les analyses d’alors. Pire, la découverte du réchauffement climatique et de l’anthropocène a encore aggravé le constat.

DEIS : diplôme d’état d’ingénierie sociale

DMA : les « DMA (déchets ménagers et assimilés) » sont les déchets que tout particulier produit dans sa vie quotidienne. Ils englobent tous les déchets produits par les ménages et assimilés (certaines collectivités et certains commerçants). Ce sont donc les déchets que tout particulier produit dans sa vie quotidienne. Les déchets ménagers regroupent les ordures ménagères (non recyclables ou pas encore recyclées), les déchets recyclables secs (journaux, papiers, carton, magazines, verre, aluminium, plastique) et les recyclables dits humides, organiques ou fermentescibles (biodéchets : déchets alimentaires, déchets verts). Ces déchets sont collectés dans le cadre du service public d’élimination des déchets ménagers dont la responsabilité relève des communes ou de leurs groupements (EPIC intercommunal ou spécifique).

E3DD (École/Établissement en démarche de développement durable) : label octroyé à un établissement scolaire (école, collège, lycée) pour son engagement global (enseignements, projets et parcours éducatifs, gestion vertueuse de l’établissement) correspondant aux dix-sept objectifs de développement durable fixés dans l’Agenda 3000 lors de la COP 21 à Paris en décembre 2015.

Écosophie (écosophe) : Par ce néologisme, le philosophe norvégien Arne Naës (1912-2009) propose dans son ouvrage « La réalisation de soi, Gandhi, Spinoza, le bouddhisme et l’écologie profonde » (2015, Wildproject Éditions) une sagesse au fondement œcuménique et éclectique qui épouse harmonie et regard « épanouissant » sur la nature. À l’envers de l’anthropocentrisme (l’homme considéré comme possesseur et maitre du reste du monde à sa merci), cette « philosophie de l’harmonie et de l’équilibre écologique » nous guide vers une « association étroite » avec la nature. Par extension, dans ces nombreux articles consacrés à la pensée écologique actuelle, le journaliste Nicolas Truong (Les penseurs du nouveau monde, série d’été, le Monde du 4 au 8 août 2020) désigne « toute la bande des écosophes { ... qui...} se connait, s’écrit, s’encourage, s’apprécie, se critique et se chamaille de temps à autre aussi ».

ESMS : Établissements sociaux et médico-sociaux.

GIEC (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat) : Créée en 1988 à la double initiative du Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD) et de l’Organisation météorologique mondiale (OMM). Le GIEC a pour mandat de présenter au monde un rapport périodique décrivant l’état des connaissances scientifiques, socio-économiques et techniques. À partir de cette base de connaissance, il établit une expertise scientifique et objective sur les changements et dérèglements climatiques en procédant à un examen systématique et complet de la littérature scientifique internationale disponible qui doit servir de base de travail aux décideur·se·s à l’échelle du monde (18'000 articles pour le dernier rapport présenté en 2022). Il ne s’agit donc pas d’un organisme de recherche, mais d’expertise visant à faire état des connaissances et à synthétiser les travaux menés dans les laboratoires de recherche du monde entier ciblés sur l’évolution du climat, ses causes et ses impacts. Il ne dispose pas non plus d’un pouvoir de proposition dans la continuité de ses évaluations.

Fresque du Climat : Fondée en 2018 sur le modèle associatif. Les militant·e·s de la fresque du climat ont pour objectif de sensibiliser le public au changement climatique. Dans cette perspective, les animateurs et animatrices de la Fresque s’appuient sur une méthode de pédagogie ludique  sur le modèle de la collaboration et coopération afin de favoriser une démarche de co-construction avec les participant·e·s. Au bout de trois heures, on aboutit à une fresque résumant les mécanismes complexes du changement climatique et ses effets collatéraux tels qu’expliqués par les scientifiques en charge de ces questions (Groupe d’experts internationaux sur le Climat-GIEC, Haut-Conseil pour le Climat etc.). Plus précisément, il s’agit d’un atelier où trois phases se succèdent :

  • La première phase de type technique consiste à construire collectivement la fresque en reliant les 42 cartes du jeu mis à disposition des participant·e·s sur les bases des éléments et des conclusions des experts du GIEC.
  • La deuxième phase de type artistique et créatif : les participant·e·s s’investissent en décorant la fresque avant de lui donner un titre.
  • Dans la troisième phase de type débriefing, il s’agit de laisser libre cours à chacun·e pour exprimer son sentiment et échanger sur les solutions individuelles ou collectives à mettre en place pour lutter contre le changement climatique.
  • L’ambition de ce projet à portée pédagogique consiste à « créer une chaine d’acteurs à croissance exponentielle pour » [...] « atteindre le point de bascule sociale qui permettra le tournant vers un monde bas-carbone » (https://fresqueduclimat.org/projet/, consulté le 29 Juin 2022)

Lois et dispositifs

Grenelle de l’environnement 1 et 2 en 2009 et 2010, Transition énergétique et de croissance verte en 2015, Reconquête de la Biodiversité en 2017, Antigaspillage et Économie circulaire en 2019, Orientation des mobilités en 2020, Climat et résilience en 2021, Accélération des énergies renouvelables en 2023.

Parmi les dispositifs qui concernent le travail social, il faut noter les Projets Alimentaires Territoriaux (PAT) créés par la Loi agriculture de 2017 ; l’obligation de servir 25% de produits bio et locaux dans la restauration alimentaire instaurée par la Loi Egalim en 2018) ; en matière de performance, de confort thermique, et de sobriété énergétique, l’obligation en matière de construction de respecter la RE 2020 (réglementation énergétique), la réalisation annuelle d’un bilan de gaz à effet de serre (BEGES), l’application du décret « tertiaire » dans l’objectif d’une réduction massive de la consommation énergétique à l’horizon 2035 ; le tri à la source généralisé aux déchets organiques (biodéchets) depuis 2023 et étendu en 2025 à « 6 flux » (papier-carton, plastique, métal, verre, textiles, bois) à l’échéance 2025... (Loi AGEC).

5 R : Refuser ; réduire ; réutiliser (ou réparer/réemployer) ; recycler ; régénérer (rendre à la terre).

Schift project : créée en 2010, il s’agit d’un laboratoire d’idée qui fonctionne sur le modèle des thinks thanks anglo-saxons. Reconnue d’intérêt général sous le statut d’association de type loi 1901, l’organisme a pour objectif d’apporter sa contribution en faveur de l’atténuation du changement climatique et la réduction de la dépendance de l’économie aux énergies fossiles, particulièrement au pétrole.

SNBC : Stratégie nationale bas carbone.

Tiers paysage : Totalement opposé aux méthodes industrielles et aux intrants chimiques dans sa pratique et conception de paysagiste, Gilles Clément défend dans son travail la notion et l’application du « tiers paysage », qui désigne un espace naturel et vivant (friche, réserve, forêt, parc) en libre évolution, développant spontanément une biodiversité riche et variée, en opposition aux espaces agricoles et sylvicoles appauvris par une gestion agronomique industrialisée. Gilles Clément définit le tiers paysage « comme un ensemble de fragments d’espace, de territoires d’accueil à la diversité » (« Jardin, paysage et génie naturel (4), conférence au collège de France, enseignement 2011/2012). Pour lui, « il s’agit principalement de lieux où l’homme ne s’occupe pas, c’est-à-dire que c’est une somme de délaissées — comprendre laissées à l’abandon par l’homme — » (Ibidem). À ce titre, les friches urbaines délaissées où s’épanouit spontanément une flore sauvage non aménagée constituent par excellence un « Tiers Paysage ». C’est à Lille que l’on trouve un exemple significatif de son travail, au Parc Henri-Matisse. Perché sur un haut socle de béton au milieu du parc, l’ilot Derborescence (en référence à une réserve suisse inaccessible) est totalement livré à lui-même. Véritable laboratoire écologique uniquement autorisé à l’observation scientifique, l’îlot, qui se compose d’une plantation d’arbres composée de plusieurs essences boréales, est inaccessible et interdit à la fréquentation des passant·e·s.

UNIOPSS : Union nationale interfédérale des œuvres et organismes privés sanitaires et sociaux

[1]Grandgeorge, D. « L’écologisation du travail social ; Les établissement sociaux à l’épreuve du changement climatique et de l’effondrement de la biodiversité ». Genève : Editions Ies, 2022, 352 pages

[2] Les mots en gras sont définis dans le lexique en fin d’article.

[3]Ecole nationale des solidarités, de l’encadrement et de l’intervention sociale (ENSIS) Annecy, Institut régional du travail social (IRTS) Franche-Comté

[4]Ecole des métiers santé social (OCELIA) Lyon, HETS Valais, Praxis Mulhouse

[5]HETS Genève

[6]Association régionale pour la formation, la recherche et l'innovation en pratiques sociales (ARFRIPSS) Lyon, HETS Genève

[7]IRTS Hauts de France, Institut régional de formation sanitaire et sociale (IRFSS) Tours, HETSL

[8]IRTS Lorraine, Praxis Mulhouse

[9]Comme à l’École supérieure européenne de l’intervention sociale (ESEIS) de Strasbourg

[10]HETS Genève et Valais

[11]Un format semblable a été donner à une demi-journée/table ronde organisée à Lyon conjointement par l’ARFRIPS et OCELLIA.

[12]Collaboration ARFRIPS/OCELLIA à Lyon

[13]Cours donné avec Yves Ecoeur, directeur de l'entreprise OSEO Vaud et de l'association Prolog-social œuvrant en faveur de la réinsertion professionnelle en matière d'économie sociale et solidaire.

[14]L’IRTS de la Réunion et l’ESEIS strasbourgeois

[15] L’auteur de cet article y est sollicité depuis deux années scolaires

[16]Le parcours de la formation CESF est fixé à 540 heures.

[17]Ce qui provoque l'arrêt du processus de photosynthèse et automatiquement de l'assimilation du CO2 par la plante. CO2 — s'il fallait le rappeler — qui se trouve être le vecteur principal (à hauteur de plus de 70 %) des gaz à effet de serre (GES) à la source du réchauffement climatique...et par ailleurs, de la vie sur terre....

[18]Dont Homo Sapiens fait partie, s'il fallait le rappeler...


Lire également :

Cet article appartient au dossier Durabilité

Comment citer cet article ?

Dominique Grandgeorge, «Répondre à l’urgence écologique dans la formation», REISO, Revue d'information sociale, publié le 22 décembre 2023, https://www.reiso.org/document/11820

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