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Le malaise des indécis face aux vaccins

Jeudi 16.10.2014
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Même si la vaccination est une mesure de santé publique efficace, elle suscite des hésitations auprès de certaines personnes. Leurs craintes révèlent la difficulté de notre société contemporaine à apprivoiser les risques.

Par Claudine Burton-Jeangros, sociologue, Département de sociologie, Faculté des sciences de la société, Université de Genève

Du point de vue de la santé publique, la vaccination est une mesure efficace qui permet de réduire le poids de différentes maladies infectieuses au sein de la population. Depuis le XIXe siècle, les campagnes de vaccinations se sont multipliées, elles ont notamment permis l’éradication de la variole dans les années 1970. Aujourd’hui pourtant, le bien-fondé de la vaccination est questionné par une partie du public, que ce soit autour de vaccinations bien établies comme celle de la rougeole, ou l’introduction de nouveaux vaccins tels que celui développé en automne 2009 contre la grippe H1N1, ou celui proposé aux jeunes femmes pour se prémunir du papillomavirus et par conséquent du cancer du col de l’utérus. J’ai rencontré cette problématique pour la première à la fin des années 1990, dans le cadre de ma thèse de doctorat qui visait à décrire différentes cultures du risque au sein des familles genevoises. Des mères m’avaient alors fait part de leurs difficultés à prendre la bonne décision lorsqu’elles se trouvaient confrontées à la demande de vacciner leur enfant contre la rougeole, les oreillons et la rubéole : « Moi j’ai l’impression que j’ai pris ceinture et bretelles, en les faisant vacciner et ensuite en allant faire les drainages chez l’homéopathe […] parce que je n’arrivais pas à décider. »

Allant au-delà d’une opposition entre des parents faisant vacciner leurs enfants selon les recommandations officielles et des parents s’y opposant catégoriquement, le malaise des indécis peut être considéré comme révélateur d’un nouveau rapport aux risques dans nos sociétés. En effet, alors même que de plus en plus de moyens sont mis en œuvre pour protéger la santé de la population, les informations contradictoires se multiplient et les craintes quant à d’éventuels dangers futurs semblent s’exacerber. S’appuyant sur les études de sciences sociales menées depuis une vingtaine d’années dans les pays riches, cet article vise à décrire quelques-uns des éléments nourrissant cette indécision.

Les risques de la maladie contre les risques de la vaccination

Les craintes relatives aux effets secondaires de la vaccination ont été alimentées par la publication en 1998 d’un article dans le Lancet, revue médicale de référence, suggérant que le vaccin combiné contre la rougeole, les oreillons et la rubéole pourrait causer l’autisme. Ces résultats relayés par les médias ont induit une baisse de la couverture vaccinale et une augmentation des cas de maladie, y compris en Suisse. Alors même qu’ils ont été démentis par des études ultérieures et que l’article a été retiré de la revue en 2010, ces résultats ont initié des préoccupations relatives aux effets secondaires de la vaccination qui sont désormais fréquemment évoquées au sein du public. Dans la continuité du débat sur les conséquences éventuelles des adjuvants, les craintes relatives à des conséquences de la vaccination à plus ou moins long terme, et non encore documentées, l’emportent parfois sur la peur de la maladie elle-même. Le risque d’attraper la rougeole, une maladie « connue » voire familière si elle a été personnellement expérimentée, est préféré par certains aux incertitudes associées à la vaccination. Pour des affections qui font peur en revanche, comme le tétanos et la poliomyélite, les couvertures vaccinales restent élevées. Les représentations socioculturelles de la maladie et des risques influencent donc l’indécision. En outre, la logique de précaution, collectivement de plus en plus souvent invoquée, peut être invoquée pour justifier l’abstention.

Certains considèrent par ailleurs que la vaccination pourrait surcharger le système immunitaire. Dans cette perspective, une immunité qui se construit naturellement – en exposant le corps à la maladie elle-même – est jugée préférable à une immunité artificielle induite par une intervention technique. Cette manière de penser, relayée par les praticiens des médecines alternatives, est associée à une conception holiste du corps et de la santé mettant en avant l’équilibre global de l’individu. Dans ce cadre, les efforts consentis en matière d’hygiène de vie – alimentation, rythmes de sommeil, activité physique – sont jugés suffisants pour protéger de la maladie.

La santé publique en tension avec la liberté individuelle

La résistance à la vaccination n’est pas nouvelle. Elle a été documentée en Grande-Bretagne, dès l’introduction de l’obligation de vacciner les enfants contre la variole en 1853. Des émeutes violentes sont attribuées au mouvement anti-vaccination et en réponse à ses pressions un droit de refuser la vaccination a d’ailleurs été obtenu en 1907. Aux Etats-Unis aussi des mouvements se sont constitués dès 1879 en vue de limiter la législation de santé publique. Les critiques ont régulièrement dénoncé le pouvoir des autorités nationales, du pouvoir colonial ou encore de l’industrie pharmaceutique autour des campagnes de vaccination. Les craintes relatives aux pressions de l’industrie pharmaceutique ressurgissent régulièrement et d’ailleurs le président de la commission santé du Conseil de l’Europe, le médecin et épidémiologiste allemand Wolfgang Wodarg a obtenu en janvier 2010 qu’une commission d’enquête examine le rôle de l’industrie dans les décisions prises par l’Organisation mondiale de la santé autour de la pandémie H1N1.

L’obligation vaccinale imposée par certains gouvernements (par exemple la France, l’Italie et les Etats-Unis) est aujourd’hui contestée au nom de la liberté individuelle. En Suisse, où aucune vaccination n’est obligatoire au niveau national, l’éventualité d’une telle obligation dans la nouvelle Loi fédérale sur les épidémies a récemment suscité des débats. Au-delà du processus d’individualisation propre aux sociétés modernes, plusieurs mécanismes ont contribué à renforcer les attentes de pouvoir prendre soi-même la décision de (se faire) vacciner ou pas. D’une part, les campagnes d’éducation à la santé des dernières décennies ont fortement mis en avant la responsabilité des individus à prendre eux-mêmes en charge leur santé. D’autre part, la reconnaissance des droits des patients associée à l’exigence de transparence ont mis au premier plan l’exigence de choix informés en matière de santé. Les demandes individualisées de certains parents, qui négocient un ajustement du calendrier de vaccination ou une vaccination ciblée pour leur enfant, rendent compte de cette volonté de faire valoir sa singularité face à des recommandations jugées trop standardisées.

Informer sans polariser ?

Constatant que l’obligation est contre-productive, les autorités de santé publique misent sur l’éducation. Elles regrettent donc la présence active des adversaires de la vaccination dans les médias traditionnels et sociaux et espèrent améliorer les couvertures vaccinales en informant le public. Les études de sciences sociales viennent toutefois nuancer ces attentes. Les représentations des risques au sein du public ne sont pas simplement induites par les discours des médias. Ceux-ci participent bien aux processus d’interprétations des risques dans la société, mais les membres du public questionnent les informations qui y sont véhiculées et les interprètent à la lumière d’expériences concrètes et d’interactions avec d’autres individus perplexes face à la vaccination. Les indécis sont souvent bien informés et se sentent dès lors démunis face à la nécessité d’arbitrer des informations contradictoires. Des travaux soulignent l’existence de critiques sociales envers les positions polarisées du débat actuel, positions qui mettent en lumière les efforts de persuasion tant de la santé publique que des adversaires de la vaccination.

Les personnes devant prendre une décision sont à la recherche d’interlocuteurs qui pourraient les aider à prendre une décision acceptable à leurs yeux. Dans un contexte général de méfiance envers les institutions et leurs représentants, la qualité de la relation établie avec les professionnels de la santé est jugée comme un facteur important dans le processus de décision. Les médecins en pratique privée adoptent cependant des positions contrastées envers la vaccination, ils n’y sont pas nécessairement favorables voire ne souhaitent pas engager la discussion avec des patients perplexes, souvent très informés. A cet égard, il faut souligner que la large diffusion d’informations relatives à la santé et les stratégies visant à encourager les connaissances du public (health literacy) contribuent à former un public de plus en plus réflexif. La transformation des recommandations, par exemple la recommandation récente de vacciner les femmes enceintes contre la grippe suite à H1N1 ou la mise en cause des bénéfices de la vaccination contre la grippe des professionnels, alimente par ailleurs le sentiment que les connaissances ne sont pas stabilisées.

L’indécision face à la vaccination est révélatrice d’un climat social marqué par des attentes sociales élevées en matière de sécurité face à la santé et par une aversion généralisée face aux risques. Les décisions engageant des compromis entre différents risques (ceux de la maladie et ceux de la vaccination) sont difficiles à prendre. La visibilité de cette ambivalence ne devrait toutefois pas amener à conclure que tout le public est hésitant envers les vaccinations puisque une majorité souscrit aux recommandations et une minorité s’y oppose catégoriquement. Dans les termes du sociologue allemand Ulrich Beck, l’anxiété de ceux qui oscillent entre ces positions est emblématique de la société du risque.

Références

  • Beck U (2001) La société du risque, Paris, Aubier.
  • Burton-Jeangros C (2001) Cultures familiales du risque, Paris, Anthropos.
  • Burton-Jeangros C et al. (2005) Adhésion et résistance aux vaccinations infantiles, une étude auprès de mères suisses, Revue d’épidémiologie et de santé publique 53 : 341-350.
  • Mouline Anne-Marie (dir.) (1995) L’aventure de la vaccination, Paris, Fayard.
  • Schindler M, Blanchard-Rohner G, Meier S, Martinez de Tejada B, Siegrist C-A, Burton-Jeangros C (2012) Vaccination against seasonal flu in Switzerland : the indecision of pregnant women encouraged by health care professionals, Revue d’épidémiologie et de santé publique 60, pp. 447-453. En ligne.

Cet article appartient au dossier Solidarité et santé