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Parler de la mort? Une boîte brise le tabou

Mercredi 13.11.2024

Un atelier original invite le public à explorer la mort à travers des objets spécifiques. Cette initiative du projet Telling Death veut transformer un sujet tabou en dialogue constructif. Interview d'une des chercheuses, Line Rochat.

boite mort projet telling death unil hetsl reiso 400© Projet telling death

(REISO) Line Rochat, qu’est-ce que cette mystérieuse « Boîte — noire — de la mort » qui est au centre de l’atelier participatif que vous proposez ?

line rochat collaboratoire unil 170© Line Rochat(Line Rochat, responsable de recherche au ColLaboratoire de l’UNIL) La Boîte a été conçue par l’équipe du ColLaboratoire — notamment Laetitia Della Bianca (responsable de recherche) et Leyla Fessler (chargée de recherche) —, avec des chercheurs et chercheuses de la Haute école de travail social et de la santé Lausanne. Nous sommes allé·es glaner une cinquantaine d’objets de-ci de-là. Ces objets font référence à divers domaines traversés par la mort : administratif, financier, spirituel, transmission, héritage, mémoire, traitement funéraire du corps, arts ou encore sciences. On y trouve donc une diversité d’objets, certains à vocation d’usage, d’autres symboliques. Ils ont été recueillis auprès de professionnel·les du funéraire et dans les réseaux d’interconnaissances de l’équipe de recherche.

Comment se déroule cet atelier ?

L’atelier dure 1h30 et se déploie en plusieurs parties : après l’entrée en matière, une activité est vouée à faire plus ample connaissance. Nous ouvrons ensuite la Boîte et exposons des objets sur une table. Chaque personne en choisit un, puis prend quelques minutes pour écrire un petit texte au nom de l’objet choisi (« je suis une bougie, je suis de telle couleur, on m’utilise pour… ») ; ce temps en individuel est suivi d’un échange en petits groupes, puis d’un retour collectif où les participant·es échangent avec les chercheurs et chercheuses et praticien·nes du funéraire présent·es. En fin d’atelier, les personnes qui le souhaitent confient leur texte à l’équipe du ColLaboratoire. Ceux-ci seront scannés et publiés sur le site Internet du projet Telling Death — Raconter la mort. L’atelier se clôt avec un petit apéritif qui permet de poursuivre les échanges.

Quelles sont les réactions du public participant à ces soirées ?

Les personnes apprécient la présence et la participation de chercheurs et chercheuses et de praticien·nes du funéraire à l’entier de l’atelier. Ce sont des figures rarement accessibles au grand public, autrement que dans un format de type conférence. L’atelier favorise la proximité et des échanges informels avec eux et elles. Les participant·es se sentent aussi confortables dans le moment final d’échange collectif pour poser des questions ou partager des expériences. Il est également à relever que le focus sur l’exploration de la Boîte et des objets plutôt que sur l’exposition de récits personnels donne à cet atelier une coloration « ordinaire » au rapport à la mort, ce qui en fait un lieu accessible à chacun·e, sans limite d’âge ou d’appartenance socio-culturelle.

La mort reste un sujet compliqué, qui peut faire peur et que beaucoup d’individus préfère éviter. Est-ce que votre projet de communication scientifique parvient néanmoins à se frayer un chemin auprès du grand public ?

Beaucoup de sujets, comme la naissance, la maladie, la violence ou la sexualité pour n’en citer que quelques-uns, sont appréhendés comme relevant de l’intime et donc non adaptés à un format collectif. La mort en fait partie. En réalité, la plupart des participant·es apprécie d’avoir accès à un espace qui aborde la question. Au-delà des particularités propres à chacun·e sur les façons de traverser ces expériences, des moments comme ceux que nous vivons dans ces ateliers contribuent à nous rappeler que ce que nous pensons relever de l’intime résonne avec les expériences des autres ; il peut y avoir un côté réconfortant à cela.

Ce projet cherche-t-il également à toucher les professionnel·les du travail social et de la santé afin de faciliter les discussions autour de la mort entre professionnel·les et bénéficiaires/patient·es ?

L’objectif principal de cet atelier est de créer des conditions favorables pour une conversation collective autour de la mort. Il est destiné avant tout à un public large, qui n’a pas nécessairement connaissance des travaux académiques menés sur la question ni des expériences des professionnel·les du funéraire. Néanmoins, nous relevons que beaucoup de participant·es ont été amené·es au travers de leur vie professionnelle à traiter cette question, et certain·es praticien·nes ayant participé à l’atelier ont formulé le souhait qu’il puisse être mobilisé dans un cadre professionnel. A suivre, donc !

(Propos recueillis par Céline Rochat)

La mort au coeur d'un projet de recherche

Le projet Telling Death — Raconter la mort est porté par la Haute école de travail social et de la santé Lausanne (HETSL) et le ColLaboratoire de l’Université de Lausanne (Unil). Il repose sur deux recherches FNS, « no lonely death », qui étudie les effets de la pandémie sur les pratiques funéraires, et « necropolis », une recherche ethnographique de quatre ans sur les usages contemporains des prestations funéraires et des cimetières. Telling Death est complété par des rencontres, un podcast et une exposition.

Ce projet est soutenu par le Fonds national suisse de la recherche. Il est réalisé en partenariat avec le Palp Festival et Village, la Commune de Chavannes-près-Renens et Connaissance 3 – l’Université des seniors du canton de Vaud. Plusieurs activités et événements sont proposés dans le cadre de ce projet : ateliers participatifs, podcasts, écoutes collectives, visites et conférences, exposition.

Le prochain atelier participatif « Ouvrir la Boîte (noire) de la mort » aura lieu le mardi 3 décembre 2024, entre 18h30 et 20h, au Café de la Main UNIL-CHUV, à Lausanne, puis le jeudi 16 janvier 2025 à la salle de paroisse de Payerne. Lien d’inscription

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