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Apprendre à manger sain à la cantine scolaire

Jeudi 10.09.2020
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Une enquête réalisée dans treize lieux d’accueil parascolaire de la ville de Genève a exploré les perspectives des enfants sur les repas servis à la cantine. Quelle place y fait-on aux goûts d’enfants de différents milieux socioéconomiques ?

Par Michele Poretti et Héloïse Durler, Haute école pédagogique du canton de Vaud

Ces dernières décennies, le nombre d’enfants qui fréquentent les cantines scolaires a considérablement augmenté, en Suisse comme ailleurs. Cette tendance est associée au besoin croissant de concilier famille et travail et à l’ambition de garantir l’égalité des chances, en fournissant à chaque enfant un cadre d’accueil favorisant le développement, la socialisation et l’intégration. Elle s’est accompagnée, comme dans de nombreux domaines d’action sociale ou éducative, d’une standardisation et d’une rationalisation de l’offre de services, les ressources étant généralement calculées au plus près des besoins estimés des usagers.

En accord avec la Constitution cantonale (art. 204), la Ville de Genève poursuit une politique d’accueil universel unique en Suisse, où chaque enfant a droit à une place au parascolaire. Ce choix politique inclusif n’est pas sans conséquences. Ces dernières années, la forte croissance de la fréquentation des lieux d’accueil en ville de Genève (plus de 40% depuis 2010) a mis à dure épreuve le dispositif sur le plan des locaux, du personnel et des rythmes de travail, conduisant à la mise en place de deux services de repas consécutifs, l’un destiné aux plus jeunes (1-4P) et l’autre aux plus âgés (5-8P).

Le dispositif d’accueil, qui fait intervenir un réseau complexe d’acteurs étatiques et associatifs, promeut une certaine idée du repas pris à la cantine. D’après le Groupement intercommunal pour l’animation parascolaire (GIAP, 2013), chargé de l’accueil et de l’encadrement des enfants, il s’agit d’« adapter les quantités aux besoins de chaque enfant et le stimuler à goûter de tout afin de découvrir de nouvelles saveurs », de « trouver une juste mesure afin de convaincre sans forcer », en amenant progressivement les enfants à comprendre « la nécessité d’une alimentation saine et variée ». Les repas servis aux cantines scolaires genevoises adhèrent aussi aux exigences du label Fourchette Verte Junior (2013), qui vise à proposer des menus « variés et équilibrés » et à « offrir un environnement sain en respectant la législation concernant l’hygiène et en effectuant le tri des déchets ».

Qu’en disent les enfants ?

Les démarches d’enquête menées auprès des enfants (sondage, discussions de groupe, observation du repas) font état de préférences et de pratiques alimentaires très variées [1]. Si les enfants ont globalement des avis mitigés sur les repas pris au réfectoire, des filles et des garçons enthousiastes, y compris lorsqu’il s’agit de salade ou de brocolis, côtoient des enfants qui détestent les repas proposés. Les appréciations des repas diffèrent aussi de manière très significative entre les lieux d’accueil, y compris lorsque ceux-ci sont desservis par le même cuisinier.

Contrairement à ce que prétendent certains experts (cf. Fourchette Verte Suisse, 2013), ces différents goûts sont difficilement attribuables à une succession de « stades de développement du comportement alimentaire », corrélés à l’âge et caractérisés, en particulier, par la néophobie, ou aversion pour la nouveauté. Le genre ou l’allophonie sont aussi très faiblement associés aux variations de goûts observées. L’origine sociale des élèves joue en revanche un rôle déterminant dans les avis exprimés par les jeunes répondant·e·s : les enfants des écoles situées dans les beaux quartiers tendent à être plus critiques que leurs pairs des milieux populaires vis-à-vis des repas servis à la cantine scolaire.

L’enquête montre, en effet, que l’expérience du repas va bien au-delà de la qualité nutritive et gustative des mets et qu’elle fait intervenir des dimensions esthétiques, relationnelles et sociales. Les jugements exprimés par les enfants sont à lire, en particulier, à la lumière des pratiques alimentaires familiales (à la maison ou lors des sorties au restaurant), qui diffèrent selon l’origine des élèves. Là où les enfants des quartiers populaires se plaignent parfois du coût exagéré de l’accueil parascolaire, leurs pairs des quartiers les plus aisés soulignent souvent, en creux, l’écart qui sépare le repas à la cantine de leurs habitudes gastronomiques. Leurs commentaires révèlent en particulier la place réduite accordée à leurs demandes et à la négociation autour des plats qui leurs sont servis. Gauthier (6P), par exemple, observe : « ce qui m’énerve c’est que le couscous, ils entassent, (…) ils mettent d’abord le couscous ensuite ils mettent les courgettes par-dessus, il reste plein de place par-dessus les courgettes et ensuite le poulet ils te le mettent tout de suite avec de la sauce qui dégouline partout, c’est immangeable ». Chiara (5P), une de ses camarades, se plaint aussi de la manière dont elle est servie : « [Q]uand on dit ’on peut avoir un peu de côté?’ ils mettent en plein milieu de la salade ».

Ces résultats soulignent que le dispositif d’accueil et de restauration de midi, soumis à la nécessité de garantir un rythme soutenu des repas avec des ressources limitées et essentiellement focalisé sur le contenu nutritif et gustatif des assiettes, peine à prendre en compte à la fois la parole des enfants et la pluralité de leurs goûts. Ils soulignent en particulier que l’estimation de la « qualité » du repas est indissociable des appartenances sociales des enfants et des conditions dans lesquelles celui-ci se déroule à la cantine.

Manger sain ou manger un bon repas ?

L’objectif d’amener tous les enfants fréquentant la cantine à « manger sain » doit donc être réexaminé sous l’angle des pratiques des différents acteurs de la pause de midi. Il importe notamment d’interroger l’association étroite entre « bon repas » et « manger sain », aujourd’hui largement répandue, à la lumière des pratiques alimentaires des enfants de milieux sociaux distincts [2]. Les enfants des milieux les plus aisés adhèrent largement aux normes qui sous-tendent le dispositif d’intervention. Leurs critiques, parfois très virulentes, visent ainsi à en souligner les incohérences ou les défaillances par rapport à des idéaux globalement partagés. Pour les enfants des milieux populaires, en revanche, l’idée du « bon repas » semble plus associée au repas « bon au goût », voire au repas riche et nourrissant, ce qui les amène à questionner, plus ou moins explicitement, l’idéal-même du repas équilibré, ainsi qu’à interroger le rapport coût-prestation.

L’ambition d’amener les enfants, sans contrainte, à « goûter de tout » se traduit au quotidien de manières multiples. Si certain·e·s animatrices et animateurs cherchent effectivement à convaincre les enfants par l’argumentation et l’encouragement, d’autres sont amenés à hausser le ton, comme cette animatrice qui, alertée par un collègue débutant, désarmé face au refus de certains enfants de manger de la salade, s’adresse en criant à tout le réfectoire : « Eh, ça va pas ? On ne change pas les règles, vous devez prendre un petit peu de salade, vous le savez ! »

D’autres encore tolèrent que les enfants refusent de manger certains aliments, souvent au nom du maintien d’une atmosphère conviviale et de l’intérêt des enfants de passer une pause de midi agréable, s’écartant ainsi des idéaux poursuivis par les décideurs. Les enfants, de leur côté, ressentent souvent l’injonction à « goûter de tout » comme injustifiée. Melinda (5P), issue d’un quartier populaire, exprime ce sentiment ainsi : « Parce que moi j’ai pas envie de manger les légumes et les profs ils nous obligent. Et c’est dégueulasse, les légumes. C’est dégueulasse ». A une question d’une camarade concernant les raisons de l’absence d’hamburgers et de frites aux cuisines scolaires, un garçon d’un beau quartier répond quant à lui, tout en nuances : « Car ils veulent faire des repas équilibrés, mais personnellement je trouve qu’ils pourraient faire des exceptions, car manger que des repas avec que des légumes ce n’est pas amusant pour certains. »

Plusieurs idées du « bon repas » et du « manger sain » se côtoient donc, non sans tensions ou contradictions, aux cantines scolaires. Comment atteindre, avec des ressources soumises à de fortes pressions, les objectifs éducatifs ambitieux du parascolaire de midi, qui associent inclusion, convivialité, alimentation et santé ? Cette recherche souligne la nécessité d’élargir la focale au-delà du contenu de l’assiette, préoccupation centrale des standards actuels, en portant le regard sur l’expérience du repas à la cantine dans son ensemble et sur l’interaction entre des normes et des goûts disparates, produits, en grande partie, en dehors de l’école.

Références bibliographiques

Chen, W-T (2016). From ‘junk food’ to ‘treats’. How poverty shapes family food practices. Food, Culture & Society, 19(1), 151-170.

Depecker T. (2010) Les cultures somatiques : usages du corps et diététiques. Revue d’études en agriculture et environnement, 91(2), 153-184.

Fourchette Verte Suisse (2013). Fourchette verte junior 4 à 15 ans. Partie spécifique. Fourchette verte – Le label de l’alimentation équilibrée.

Groupement intercommunal pour l’animation parascolaire [GIAP] (2013). Références institutionnelles pour l’accueil des enfants au sein du Groupement intercommunal pour l’animation parascolaire. Genève, Suisse: Groupement intercommunal pour l’animation parascolaire.

Longchamp P. (2014). Goûts de liberté, goûts de nécessité : quand la diététique s’en mêle, Sociologie et société, 46(2), 59-82.

Poretti, M., Durler, H., & Girinshuti, C. (2019). Les enfants évaluent le parascolaire de midi. Rapport de l’évaluation participative de la prestation d’accueil et de restauration parascolaires de midi en Ville de Genève. Haute école pédagogique Vaud, Lausanne, Suisse.

[1] Poretti, M., Durler, H., Girinshuti, C. (2019). Les enfants évaluent la pause de midi. Rapport de l’évaluation participative de la prestation d’accueil et de restauration parascolaire de midi réalisée en 2018 en Ville de Genève. Lausanne, Suisse : Haute école pédagogique du canton de Vaud. En format pdf

[2] Chen, W-T (2016). From ‘junk food’ to ‘treats’. How poverty shapes family food practices. Food, Culture & Society, 19(1), 151-170 ; Depecker T. (2010) Les cultures somatiques : usages du corps et diététiques. Revue d’études en agriculture et environnement, 91(2), 153-184 ; Longchamp P. (2014). Goûts de liberté, goûts de nécessité : quand la diététique s’en mêle, Sociologie et société, 46(2), 59-82.

Cet article appartient au dossier À table!

Comment citer cet article ?

Michele Poretti et Héloïse Durler, «Apprendre à manger sain à la cantine scolaire», REISO, Revue d'information sociale, mis en ligne le 10 septtembre 2020, https://www.reiso.org/document/6341

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