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Établir des standards contre les violences domestiques

Mercredi 04.01.2023

Un panel d’expertes et experts internationaux fait état de lacunes importantes dans ce domaine. Trois questions à Isabelle Fisher, secrétaire générale de l’Association professionnelle Suisse de consultations contre la violence.

isabelle fisher 170Isabelle Fisher © I.F.

(REISO) Le rapport du GREVIO (Group of experts on action against violence against women and domestic violence) critique le manque de ressources allouées à la lutte contre les violences domestiques en Suisse. Il pointe aussi du doigt les discriminations et le manque de protection des personnes touchées. Ce constat vous surprend-il ?

(Isabelle Fisher) En tant que secrétaire générale de l’Association professionnelle suisse de consultations contre la violence, j’ai pu participer à des discussions avec plusieurs ONG et également avec le GREVIO lors de sa venue en Suisse en février dernier. De ce fait, je ne suis pas surprise par ces résultats. Il ne faut pas voir ce rapport comme quelque chose de négatif. Le fait que des instances internationales pointent du doigt nos points faibles va permettre à une association comme la nôtre d’avoir des arguments supplémentaires pour demander plus de ressources au gouvernement. La Suisse fait déjà beaucoup pour lutter contre cette problématique, mais elle peut aussi s’améliorer.

Concrètement, que devrait faire la Suisse pour être plus efficace ?

Il faudrait déjà établir des standards de qualité pour la formation des professionnel·le·s qui travaillent tant avec les auteur·trice·s de violence. Le GREVIO insiste en effet sur la grande hétérogénéité des programmes proposés en fonction des cantons. Les assistant·e·s sociaux, les différent·e·s thérapeutes qui travaillent avec les personnes violentes n’ont pas suivi une école spécifique leur permettant de faire face à ce type de population. Les services de justice et les ONG proposent souvent leur propre cours, mais il faudrait uniformiser les pratiques et allouer plus d’argent à la formation.

Selon le rapport, la Suisse n’investit pas assez d’argent dans la lutte contre les violences, partagez-vous ce constat ?

Oui et non : les services de justices cantonaux ont des ressources. Le problème est surtout au niveau des ONG qui ne disposent pas de l’argent public et qui parviennent à remplir leur mission avec des moyens très limités. La Confédération pourrait allouer des montants plus importants pour aider ces petites structures à fonctionner et ainsi venir en aide aux personnes concernées. À noter que dans le cas de la lutte contre les violences, le fédéralisme n’aide pas à être efficace. Selon votre canton de domicile, vous avez à disposition certaines prestations que d’autres personnes habitant à quelques kilomètres n’ont pas. Le GREVIO demande également la mise en service d’un numéro de téléphone commun à toute la Suisse qui puisse répondre aux victimes 24 h/24 et 7 j/7.

(Propos recueillis par Yseult Théraulaz)

Commentaire
 
Marie-Claude Hofner le 12.01.2023

J'ai pris connaissance avec plaisir de l'interview de Mme Isabelle Fisher sur la récente évaluation par le GREVIO des politiques suisses en matière de lutte contre la violence envers les femmes. En tant que membre du GREVIO, je suis heureuse de voir que notre travail est repris et commenté par les professionnelles de notre pays. Toutefois j'estime que les ressources financières restreintes dédiées à la lutte contre les violences faites aux femmes en Suisse, n'impacte pas que le soutien aux ONG mais bien l'ensemble des politiques publiques dans notre pays.

Pour assurer une formation convenable de tous les professionnel·le·s, concernés, il faut une volonté politique et des moyens financiers importants, de même que pour mener une campagne nationale de sensibilisation ou équiper toutes les régions de centres d'accueil. Lors de la lutte contre l'épidémie de VIH/sida dans les années 90, les financements d'envergure alloués par le Confédération ont permis à la Suisse de mener une campagne exemplaire qui a porté ses fruits. Il serait souhaitable que des ressources au moins aussi importantes, soient attribuées à la lutte contre « l'épidémie » que représente la violence contre les femme, les enfants et la violence domestique.

Dr Marie-Claude Hofner, membre du GREVIO

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