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Après le colloque sur les certificats d’incapacité de travail

Lundi 07.09.2009

Les certificats d’incapacité de travail

Compte-rendu du colloque du 3 septembre 2009 organisé par le Centre d’étude des relations de travail et l’Institut de droit de la santé de l’Université de Neuchâtel

Les médecins sont dans le collimateur de certains juges qui se méfient des certificats d’incapacité de travail délivrés « par complaisance ». Dans cette querelle, que devient le travailleur malade, accidenté ou invalide ?

Lors du colloque sur les certificats d’incapacité de travail, Me Olivier Subilia a ouvert les hostilités avec verve. Le vice-président du Tribunal des prud’hommes de l’arrondissement de la Côte, à Nyon, s’est habilement moqué des médecins en décrivant le contenu « absurde ou surréaliste » des certificats médicaux qui arrivent sur son bureau. Il s’est également appliqué à décrire les « mensonges » éhontés d’employés et les « difficultés » des employeurs à faire respecter leurs droits élémentaires. Dans l’auditoire composé d’une centaine de personnes, les éclats de rire complices ont fusé, les soupirs désapprobateurs aussi.

Le juge joue au bourreau

Pour Me Subilia, le certificat médical n’est pas une preuve de l’atteinte à la santé d’un employé et de son incapacité de travail. A ses yeux, la loi est claire et confie au juge toute la marge d’appréciation nécessaire pour évaluer la crédibilité de ce certificat. « Nous avons le pouvoir d’appréciation et il faut l’utiliser sinon il va s’user. » Ainsi, dans sa pratique, il écarte en particulier :
- les certificats avec effet rétroactif,
- les consultations téléphoniques,
- les certificats rédigés à une date proche de celle d’un licenciement,
- les certificats signés par un médecin non spécialisé dans la maladie mentionnée.

Les médecins demandent grâce…

Cette intervention musclée a suscité l’agacement de plusieurs médecins. « Le monde n’est pas fait que de pauvres employeurs, de méchants employés et de médecins complaisants. La réalité est plus subtile », a précisé une psychologue. « Ne faudrait-il pas favoriser le dialogue entre les médecins et les juges au lieu de les monter les uns contre les autres ? » a demandé un médecin du travail.

C’est Me Daniele Cattaneo, président du Tribunal tessinois des assurances, qui a réussi à calmer les esprits. Dans sa pratique, il privilégie l’audition personnelle du médecin traitant et obtient ainsi des informations beaucoup plus pertinentes sur la santé du patient, tant d’un point de vue physique que psychique et social. Le Tessinois a aussi rassuré les médecins présents en demandant aux juristes de faire preuve d’« humilité » dans leurs jugements. Surtout, il a rappelé un aspect important et largement méconnu de la législation : le juge ne doit pas établir la « certitude » de l’incapacité (de travail ou de gain) de l’employé, mais sa « vraisemblance ». Un rappel juridique et une belle leçon d’humanisme utiles pour les auditeurs parmi lesquels il semble qu’il n’y avait aucun travailleur licencié, malade ou invalide ni aucun représentant d’association qui défend les chômeurs ou les personnes en situation de handicap.

… et les invalides s’évanouissent

Après cette vive querelle sur la capacité de travail restait à examiner l’autre question soulevée par les certificats et expertises médicales : celle qui consiste à fixer le pourcentage de l’incapacité de gain et le droit à une rente partielle ou totale de l’Assurance invalidité (AI). Pour Me Jacques-André Schneider, de l’Université de Lausanne, la volonté fédérale d’économiser les sous des assurances sociales est devenu une réalité tout à fait tangible. Un chiffre a suffi à montrer l’évolution très restrictive de l’AI : 35%. C’est la diminution du nombre de nouvelles rentes d’invalidité octroyées depuis 2003 ! Autant dire qu’en Suisse, il vaut mieux être juriste ou médecin en pleine activité et en pleine santé qu’employé peu qualifié et invalide…

Marylou Rey

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