Jeunes adultes en difficultés: profils sous analyse

Lundi 17.11.2025
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Une enquête sur les mesures d’insertion sociale de transition (MIS T) dans le canton de Vaud montre que les 18-25 ans en difficulté ne forment pas un groupe homogène. Quatre profils types ont ainsi été identifiés.

Par Joseph Hivert, collaborateur scientifique, et Maël Dif-Pradalier, professeur HES ordinaire, HETS Fribourg (HES-SO)

En Suisse, la problématique de l’insertion des jeunes est devenue un enjeu majeur des politiques sociales depuis les années 2000 et s’est accompagnée de la construction d’une nouvelle catégorie d’action publique : les jeunes adultes en difficulté (JAD). Définie par l’âge (18-25 ans) et associée à d’autres critères plus spécifiques (difficulté à s’insérer sur le marché du travail et au bénéfice de l’aide sociale généralement), cette catégorie est censée regrouper des jeunes partageant une même condition. Or, différents travaux, en Suisse (Bonvin et al., 2013 ; Tabin & Perriard, 2016) comme en France (Couronné et al., 2018), en ont souligné le caractère problématique : elle tend en effet à subsumer des réalités fort différentes, à gommer des différences sociales et à lisser des parcours de vie hétérogènes.

Il convient toutefois de nuancer cette critique, non seulement parce que les politiques d’insertion s’appuient parfois, dans leur élaboration et mise en œuvre, sur les connaissances disponibles concernant les publics visés, mais aussi parce que leur évaluation contribue à produire des connaissances susceptibles de les (ré)orienter. Certains acteurs publics sont par ailleurs engagés de longue date dans une démarche d’évaluation de l’action publique dont ils ont la charge. C’est le cas de la Direction de l’insertion et des solidarités (DIRIS) du canton de Vaud, qui a récemment mandaté la Haute école de travail social de Fribourg pour réaliser une étude qualitative sur les jeunes participant aux Mesures d’insertion sociale de transition (MIS T).

Mieux saisir les profils et problématiques des jeunes

Destinées aux personnes âgées de 18 à 25 ans sans formation professionnelle initiale achevée, les douze MIS T présentes dans le canton [1] préparent à une entrée ou une réintégration en apprentissage. Mises en œuvre par dix prestataires privés à but non lucratif, elles offrent près de 500 places par an et comptent des capacités d’accueil variables (entre 12 et 119 places par mesure et par an). Les jeunes y sont orientées par trois prescripteurs : le guichet de la transition 1 (T1), les Centres sociaux régionaux (CSR) et le Centre social d’intégration des réfugiés (CSIR).

A travers cette recherche (Dif-Pradalier & Hivert, 2025), la DIRIS souhaitait mieux comprendre les problématiques sociales rencontrées par les jeunes participant·es et repérer les similitudes et les éventuelles variations dans leurs profils et caractéristiques en fonction du type de MIS T intégré. Bien que l’ensemble des MIS T s’adresse en principe à un même public cible (les JAD), le mandant désirait que l’attention soit portée sur les différences de publics effectivement accueillis.

Pour mener à bien cette étude, le dispositif d’enquête a consisté à porter un regard croisé sur les jeunes participant·es et les professionnel·les qui les accompagnent. Au sein de chaque mesure, deux entretiens semi-directifs (n=24) et un focus group (n=12) réunissant entre six et huit jeunes ont été menés. Les responsables de mesure (n=12) ont également été interviewé·es, et deux focus groups ont été organisés avec des professionnel·les issu·es de chaque mesure. Ces démarches ont été complétées par des observations de diverses activités organisées dans ces structures (cours d’appui scolaire, atelier informatique, séances de coaching, etc.).

Sur la base des matériaux recueillis, quatre profils types ont été construits. Ces profils — les « malgré eux », les « vulnérables », les « empêchés » et les « désajustés » — constituent des idéaux-types, élaborés à partir de l’identification de leurs différences et de leurs similarités. Il convient de préciser que la typologie n’était pas une finalité en soi : elle a constitué un moyen ex post pour structurer la richesse du matériau collecté et de le rendre plus intelligible (Demazière, 2013).

Les «malgré eux»: vulnérabilités multiples et dépossession de soi

Parmi les publics accueillis dans les MIS T, le groupe des « malgré eux » est constitué de jeunes qui ·ent parmi les plus vulnérables, les plus précaires et qui cumulent les plus grandes difficultés (scolaires, familiales, économiques, psychologiques). Ces personnes sont souvent décrites par les professionnel·les comme des jeunes « à problématiques multiples » ou à « situations très complexes ».

Ils et elles présentent des parcours scolaires interrompus et perturbés précocement. Orienté·es en raison de leurs difficultés vers des dispositifs spécialisés, la plupart d’entre eux et elles a quitté l’école avant la fin de la scolarité obligatoire. A ces troubles s’ajoutent ensuite des difficultés économiques, en grande partie héritées. Les parents de ces jeunes adultes appartiennent en effet, en très grande majorité, aux franges les plus précarisées des classes populaires : souvent sans diplôme et sans emploi, ils sont bénéficiaires du revenu d’insertion, ou de l’Assurance invalidité (AI). Les récits évoquent des situations d’endettement, de poursuites et de défauts de bien.

De plus, ces jeunes ont aussi pour point commun de grandir dans des contextes familiaux conflictuels, marqués par des violences intra-familiales, des accidents biographiques (décès, maladie), ainsi qu’un affaiblissement du contrôle parental. Le Service de protection de la jeunesse intervient souvent dans ces familles.

Les difficultés multidimensionnelles auxquelles ils et elles sont confrontées les conduisent à connaître une diversité de prises en charge (éducative, scolaire, médicale voire judiciaire). Passé·es par des expériences d’échec à répétition et des processus d’étiquetage, ils et elles ont intériorisé au fil de leurs parcours une identité négative et un sentiment de dépossession de soi. Très éloigné·es de la norme linéaire école-formation-emploi, ces jeunes sont souvent orienté·es vers l’AI (Andiamo [2]).

Les «vulnérables»: échecs scolaires et fragilités psycho-sociales

Les « vulnérables » partagent au moins trois caractéristiques. Premièrement, ils et elles grandissent dans des familles de la petite classe moyenne exposées à un risque de déclassement social : leur contexte familial est fréquemment marqué par une fragilisation économique et professionnelle. Ensuite, ils et elles sont souvent affecté·es par différents troubles « dys » (dyslexie, dysphasie, dyspraxie…) ou de l’attention (avec ou sans hyperactivité) diagnostiqués au cours de leur scolarité ou après leur entrée en MIS T. Certain·es présentent également une fragilité psychique diffuse, ainsi que diverses problématiques psycho-sociales. Enfin, au secondaire I, les « vulnérables » suivent généralement les sections les moins exigeantes. Ils et elles y connaissent des difficultés qui se traduisent par de l’absentéisme, des redoublements, parfois des orientations en classe de développement, ainsi que par des décrochages scolaires.

Malgré ces complications, la plupart « des vulnérables » parviennent à achever leur scolarité obligatoire. A l’issue de la 11ème année, une minorité débute une formation du secondaire II par la voie de l’apprentissage. Toutefois, ils et elles font régulièrement partie des apprenti·es qui résilient leur contrat [3]. A la suite à ces ruptures et avant de rejoindre les MIS T, ces jeunes sont redirigé·es vers des dispositifs d’insertion comme le Semestre de motivation (SeMo) ou l’Ecole de la transition (EdT). Ils et elles y retrouvent alors d’autres jeunes au profil similaire, ayant aussi fréquenté des filières à exigences élémentaires, mais sans être parvenu·es à intégrer directement dans une formation post-obligatoire.

Ces jeunes sont souvent décrit·es par les professionnel·les comme « vulnérables », « peu autonomes », et dont l’insertion socio-professionnelle est entravée par des facteurs psycho-sociaux.

Les «empêchés»: obstacles institutionnels et linguistiques

La catégorie des « empêchés » regroupe principalement de jeunes issu·es de la migration économique et de l’asile. Ils et elles obtiennent en Suisse un statut de réfugié·es (permis B ou F), souvent au terme d’un parcours semé d’embûches (Epinay et al., 2021). Après un passage au Centre fédéral d’asile, ils et elles sont orienté·es vers le Centre social d’intégration des réfugiés (CSIR), qui constitue en général le point d’accès aux MIS T.

Les possibilités d’insertion de ces personnes sont entravées par des obstacles d’ordre institutionnel et linguistique, bien documentés dans la littérature (par exemple Bertrand, 2017). Les « empêchés » sont d’abord confronté·es à la non-reconnaissance de leurs diplômes. Cette absence de reconnaissance, combinée à leurs trajectoires migratoires, engendrent des situations de déclassement, notamment pour celles et ceux ayant effectué une scolarité ou une formation dans leur pays d’origine.

Majoritairement allophones, les « empêchés » font également face à d’importantes barrières linguistiques. Au-delà de la langue, les entretiens révèlent une difficulté à comprendre, à se repérer et à s’adapter au système de formation en Suisse.

Enfin, l’insertion d’un nombre significatif de ces jeunes se trouve freinée en raison de discriminations à l’embauche. Les jeunes d’origine étrangère sont particulièrement vulnérables sur le marché des places d’apprentissage (Imdorf, 2018). Les logiques de recrutement qui s’y déploient, similaires à celles du marché du travail, exposent les candidat·es à la concurrence, aux discriminations et à la reproduction des inégalités sociales (Ibid.), en particulier dans les secteurs les plus convoités (Ruiz & Goastellec, 2016).

Les «désajustés»: ruptures scolaires tardives et pression familiale 

Les « désajustés » présentent un profil sociologique plus favorisé que la moyenne : ils et elles disposent d’un capital scolaire plus élevé ; bon nombre d’entre eux et elles ont emprunté dans le secondaire I les sections à fortes exigences (VP) puis sont entré·es au gymnase.

Si ces jeunes connaissent également des ruptures scolaires, celles-ci interviennent plus tardivement que pour les autres profils (au moment du gymnase généralement) et pour d’autres raisons. Souvent désigné·es par les professionnel·es comme « les anciens gymnasiens » ou « les bons élèves en rupture », les « désajustés » partagent plusieurs caractéristiques.

Les problèmes d’orientation constituent le premier motif avancé par ces personnes pour expliquer leur décrochage : une « erreur d’aiguillage », fréquemment imputée à la pression familiale exercée dès l’école obligatoire en vue d’une entrée au gymnase. Ces jeunes, qui déclarent souvent avoir été « forcé·es » à suivre cette voie, vivent un décalage entre leurs aspirations et attentes propres et celles de leurs parents, ces dernier·ères projetant le parcours scolaire de leurs enfants en fonction de leur propre statut social.

Deuxièmement, une grande partie des « désajustés » connait des difficultés d’ordre familial, personnel ou de santé durant le gymnase, lesquelles qui constituent un autre motif de décrochage scolaire. Ces jeunes relient l’arrêt de leur scolarité à ces problèmes, mais aussi à leur isolement social dans le cadre scolaire.

Selon plusieurs professionnel·les, ce profil est aujourd’hui plus fréquent en MIS T qu’il ne l’était auparavant.  

Une typologie utile pour repenser l’action publique

La présente classification partage certains points communs avec les typologies existantes portant sur les parcours des jeunes sans qualifications engagés dans des dispositifs d’insertion bas seuil en France (Couronné et al., 2018) comme en Suisse (Gonvers, 2016). Elle s’en distingue cependant dans la mesure où, comme toute typologie, elle découle directement des matériaux empiriques et des spécificités des publics accueillis dans les MIS T.

Si cette typologie confirme que la catégorie d’action « JAD » regroupe des jeunes aux profils et aux problématiques très hétérogènes, elle met plus spécifiquement en lumière deux apports majeurs.

D’une part, elle fait apparaître des distinctions importantes entre les jeunes fragilisés pour qui une insertion sur le court ou moyen terme est peu envisageable, et celles et ceux pour qui cette insertion reste possible, moyennant un accompagnement visant à lever certains freins psycho-sociaux ou institutionnels.

Ce résultat invite à nuancer la vulnérabilité souvent accolée à la catégorie de JAD et à mettre l’accent sur l’identification fine des leviers et des freins, qu’ils soient individuels ou contextuels.

D’autre part, la typologie révèle l’émergence d’un nouveau profil de jeunes fragilisé·es que les professionnel·les n’avaient jusqu’à récemment pas l’habitude d’accompagner dans les MIS T : les « désajustés ».

Bibliographie

[1] Le catalogue complet des mesures d'insertion du Canton de Vaud se trouve sur cette page. Les mesures de transition, au nombre de douze, concernée par cette recherche sont détaillées entre les pages 73 et 99.

[2] En savoir plus sur Andiamo.

[3] Le taux de résiliation de contrat d’apprentissage est relativement élevé en Suisse, dans les deux filières (CFC et AFP) : il était de 22% en 2017 (OFS).

Comment citer cet article ?

Joseph Hivert et Maël Dif-Pradalier, «Jeunes adultes en difficultés: profils sous analyse», REISO, Revue d'information sociale, publié le 17 novembre 2025, https://www.reiso.org/document/14823