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Embauché·e·s, mais pas inséré·e·s

Lundi 23.05.2022
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La réussite d’un programme d'insertion socioprofessionnelle pour les jeunes est souvent évaluée par la signature d’un contrat, non sur la durée d’une embauche. Ou quand les critères économiques et sociaux définissent différemment le «succès».

Par Nicole Torsi, éducatrice sociale, Casa Santa Elisabetta, et Nicolas Pons-Vignon, professeur, Centre de compétences travail, welfare et société, Haute école spécialisée de la Suisse italienne, Lugano

En 2019, selon l’Office fédéral de la statistique (2020), 3,5% des adultes âgé·e·s de 18 à 25 ans en Suisse se sont tourné·e·s vers les services sociaux pour obtenir une aide. Celle-ci est conditionnée à leur participation à un programme d’insertion par le travail.

L’analyse du projet tessinois appelé Macondo (Torsi, 2021) [1] a consisté en une revue des mesures existantes et en la réalisation de sept entretiens semi-structurés. Un focus group avec des professionnels du Tessin et du canton de Vaud a été organisé avec trois employés de l'assurance invalidité et du service d'intégration de l’Office de l’aide sociale (Tessin), un collaborateur du département de l'intégration et de la solidarité (Vaud), ainsi que deux éducateurs et une thérapeute.

Cette recherche [2] a fait émerger une réflexion sur les difficultés que rencontrent les programmes d’intégration des jeunes sur le long terme. Après avoir discuté des raisons qui les poussent à avoir recours à l’aide sociale, l’ambiguïté du « succès » de l’intégration est mise en évidence. En fin de compte, la temporalité des programmes d’insertion semble être responsable de leur incapacité à offrir aux bénéficiaires le soutien dont ils·elles ont besoin.

Facteurs associés au recours à l'aide sociale

Torsi (2021) a analysé le recours précoce à l'aide sociale et les interventions cantonales mises en œuvre pour l’insertion des jeunes. Les principales vulnérabilités de ce public concernent la gestion de leurs émotions et les compétences relationnelles, c'est-à-dire la capacité à s’adapter aux différentes situations sociales, notamment les relations de travail. Par exemple, certain·e·s souffrent de troubles anxieux lorsqu'ils·elles sont confronté·e·s à des personnes ou à des situations inconnues ; d'autres répondent de manière agressive quand on leur demande d'effectuer certaines tâches. Respecter les exigences et les horaires professionnels représente donc un défi et reflète un manque de familiarité avec les règles de socialisation. Ces difficultés se sont généralement manifestées dès la scolarité, que beaucoup n'ont pas achevée.

Les parcours des bénéficiaires s’avèrent ainsi souvent ponctués d’une accumulation d'échecs liés au manque d’estime de soi. Ce dernier est parfois si fort que ces jeunes n’ont aucune conscience de leurs propres capacités. Leurs expériences professionnelles, nombreuses mais de courte durée, sont typiquement interrompues à la suite de comportements dysfonctionnels dans le monde du travail, comme des retards et absences injustifiées ou des conflits personnels.

Outre leurs caractéristiques individuelles, deux autres facteurs entravent le parcours des jeunes : le fait que les projets d'insertion socioprofessionnelle ne comptent qu’un objectif limité (l'embauche) et l’attitude de certain·e·s patron·ne·s. Ces dernier·e·s sont réticents à recruter des individus qui ne répondent pas strictement aux normes de l'employé·e « modèle ». Newton et al. décrivent ainsi les qualités que recherchent les employeur·euse·s : la flexibilité en matière d'horaires de travail, l'esprit d'initiative, la rapidité et l’efficacité dans l’exécution des tâches, la motivation et une bonne santé. Les bénéficiaires de l’aide sociale ne correspondant pas à ce portrait, les entreprises ont tendance à les licencier dès qu’ils·elles ne perçoivent plus d’aides à l’emploi.

Les deux visages du succès

Perdre son emploi peut accroître le risque d'exclusion à long terme du monde du travail, aggravant ainsi les fragilités existantes des bénéficiaires (Aleni et al.). Une insertion socioprofessionnelle réussie est pourtant considérée comme une condition de l'indépendance économique et de l'épanouissement personnel, car le travail représente une reconnaissance sociale fondamentale pour l'individu. Mais que recouvre exactement cette « réussite » ? Il existe au moins deux manières différentes, voire contradictoires, de définir le succès.

L’objectif officiel des politiques publiques d’insertion se limite à ce que le·la bénéficiaire trouve un emploi, ce qui n’a en soi qu’un effet limité sur la capacité à s'intégrer dans la vie sociale. Cette vision « économique » à court terme reflète l'évolution néolibérale des politiques sociales, caractérisée par une approche conditionnelle, voire punitive, de l’aide, et un alignement sur les besoins des employeur·euse·s (Marazzi et al., 2007). Elle constitue la pierre angulaire des interventions socioprofessionnelles au niveau cantonal, dont le succès est mesuré par le taux de recrutement, sans prendre en compte les besoins des personnes.

Le financement des programmes est déterminé sur la base de ce taux : un·e jeune qui signe un contrat de travail est considéré·e comme un « succès » statistique, même s'il·elle ne parvient pas à consolider sa position professionnelle.

Une signification alternative de l’insertion réussie, inspirée par Macondo, prend comme point de départ les caractéristiques des jeunes bénéficiaires, avec l’objectif d’améliorer la qualité de vie en leur (re)donnant confiance dans leurs propres capacités. Dans une telle approche, l’insertion professionnelle est une conséquence, et non l’objectif immédiat, d’une intervention qui aide les jeunes à trouver un rythme qui leur convient, à développer de nouvelles compétences ainsi que des relations saines avec leurs pair·e·s.

L'insertion est donc appréhendée comme un processus adapté aux causes des problèmes rencontrés socialement, plutôt que comme un résultat mesurable.

La temporalité des projets incarne les problèmes de la mesure économique du succès : la durée des mesures est limitée et les jeunes subissent une forte pression pour accepter n'importe quelle offre d’emploi, sans tenir compte de leur expérience ni de leurs aspirations. L'approche des services sociaux est rigide ; ils s'en tiennent à faciliter l'insertion, sans offrir aux bénéficiaires le soutien dont ils·elles ont besoin. Par conséquent, les objectifs qui guident le travail des professionnel·le·s, en évaluant sa « qualité », sont fixés par un cadre qui n'est pas adapté à une vision d'intégration professionnelle à long terme. Ceci augmente le risque de créer un cercle vicieux, dans lequel les jeunes se retrouvent confronté·e·s à des expériences ratées qui nourrissent leur sentiment d'inadéquation.

Venir d'un programme d’aide à l’insertion constitue en soi un obstacle à l'entrée sur le marché du travail, car cela implique une stigmatisation : certains employeur·euse·s ne veulent pas prendre la responsabilité d'engager une personne souffrant de troubles anxieux ou de dépression. Il n’est pas rare que le contrat ne soit pas prolongé après la période d'essai parce que le·la jeune est considéré·e comme « lent·e », « peu sûr·e de soi » et « manquant d'expérience ».

Connaître la fréquence de l'opportunisme

D’autres bénéficiaires ont connu des situations similaires dans le cadre du marché du travail dit complémentaire. Celui-ci répond à une demande étatique de places de travail pour des personnes à statuts administratifs et a crû rapidement avec la mise en œuvre des politiques dites d’activation (Zurbuchen et al.) ; il constitue un terrain d’enquête pertinent pour analyser les pratiques d’accompagnement des bénéficiaires.

Il semble ainsi important de savoir si l’opportunisme des employeur·euse·s est un phénomène répandu, puisque que certain·e·s ne recrutent que lorsqu’ils·elles reçoivent des incitations financières.

Deux principaux types d’incitation existent. L’aide indirecte, souvent allouée pendant des périodes de stage où le·la jeune perçoit l’aide sociale, est le premier. Dans ce cas de figure, la personne constitue une main-d’œuvre gratuite pour l’entreprise, qui ne touche, elle, aucune subvention directe. Certaines sociétés « profiteraient » ainsi du système, sans donner de contrepartie positive ni ensuite embaucher de jeunes.

En deuxième lieu se trouve l’aide directe. Celle-ci est proposée lorsqu’un contrat d’embauche est signé. Dans ce cas, l’État peut contribuer temporairement au salaire du jeune, qu’il paye en partie et pendant un laps de temps défini. Il faudrait dans ce cas vérifier si la relation de travail se poursuit après la fin de la subvention ; qu’est-ce qui se passerait si les aides reçues devaient être remboursées en cas de non-confirmation de l’embauche ?

L’analyse des conditions et de la durée de l’emploi subventionné des jeunes pourrait aider à identifier des moyens incitant les patron·ne·s à mieux les intégrer dans leur effectif, augmentant ainsi les chances de « vraie » embauche.

Le paradoxe de l’aide à l’insertion 

Les jeunes bénéficiaires de l’aide à l’insertion se trouvent dans une situation paradoxale : la manière dont ils·elles sont aidé·e·s, voire poussé·e·s, à s’intégrer dans le monde du travail a tendance à exacerber leurs vulnérabilités. Mais le travail ne devrait-il pas leur permettre de s’émanciper ? S’il est sûr qu’il peut y contribuer, il ne semble pas suffire. Avilés insiste ainsi sur le besoin d’un meilleur accompagnement de ce public. Or, l'approche des services sociaux concernés ne remet généralement pas en question la position des employeur·euse·s et définit le « succès » de l’insertion en termes économiques. La différence est cependant grande entre signer un contrat de travail et conserver un emploi. L’embauche reçoit une attention prépondérante parce qu’elle détermine la reconnaissance du travail des professionnel·le·s de l’insertion. Cependant, la qualité de l'intervention sociale ne peut être observée que dans une perspective de moyen et long terme.

Un changement de paradigme s’avère nécessaire, ce qui implique de considérer des objectifs qualitatifs. Pour accompagner un·e jeune dans une insertion réussie, il est fondamental de promouvoir son estime de soi dans un environnement de travail où il·elle acquiert les outils pour réussir son avenir professionnel. L’insertion doit dépasser le carcan de politiques inspirées par la crainte des abus de l’aide sociale par les bénéficiaires et ne pas se cantonner aux attentes des employeur·euse·s, en leur demandant davantage d’efforts.

Bibliographie

  • Aleni, S. L., Sica, L. S., & Nasti, M. (2013). La generazione dei giovani senza lavoro: Transizioni all’età adulta in condizioni di precarietà, disoccupazione e sottoccupazione. Ricerche di psicologia, 3, 411–443.
  • Avilés, G. (2015). Valutazione dell'impatto del mercato secondario sulla qualità di vita individuale. Thèse de doctorat, Université de Genève.
  • Marazzi, C., Greppi, S. & Soldini, E. (2007). Nuovi bisogni, nuovo welfare: analisi dell'evoluzione delle prestazioni sociali in Canton Ticino, Manno, Scuola universitaria professionale della Svizzera italiana (SUPSI).
  • Newton, B., Hurstfield, J., Miller, L., Page, R., & Akroyd, K. (2005). What employers look for when recruiting the unemployed and inactive: Skills, characteristics and qualifications. Leeds, Department for Work and Pensions.
  • Torsi, N. (2021). Non solo un’occupazione: La presa in carico globale nei percorsi di sostegno per i giovani adulti esclusi dal mondo del lavoro. Bachelor thesis, SUPSI.
  • OFS [Office fédéral de la statistique] (2020). ASE : Taux d'aide sociale économique de différents groupes à risque. Office fédéral de la statistique.
  • Zurbuchen, A., Streckeisen, P., Kuehni, M., Greppi, S. & Benelli, N. (2020). Le marché complémentaire en chiffres, REISO, Revue d'information sociale, mis en ligne le 26 novembre

[1] Projet de la Fondation Gabbiano qui privilégie une intervention éducative et thérapeutique accompagnant la personne vers l'insertion socioprofessionnelle à travers un parcours individualisé.

[2] Cet article est né de réflexions suscitées par un mémoire de Bachelor en travail social préparé à la SUPSI sous la supervision d’Anna Bracci, que nous souhaitons remercier, ainsi que Spartaco Greppi et Gregorio Avilés.

Comment citer cet article ?

Nicole Torsi et Nicolas Pons-Vignon, «Embauché·e·s, mais pas inséré·e·s», REISO, Revue d'information sociale, mis en ligne le 23 mai 2022, https://www.reiso.org/document/9065