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Penser autrement la maladie d’Alzheimer

Lundi 10.11.2014
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Faut-il diagnostiquer les troubles cognitifs le plus tôt possible ? Les traiter précocement avec des médicaments « anti-Alzheimer » ? Ces options médicales ne font pas l’unanimité.

Par Martial Van der Linden et Anne-Claude Juillerat Van der Linden, professeur et chargée de cours à la Faculté de psychologie de l’Université de Genève, docteurs en psychologie

De fréquentes annonces alarmistes prévoient, pour les prochaines décennies, une augmentation considérable du nombre de personnes âgées vivant avec des troubles cognitifs associés à une perte d’autonomie (une démence). Face à ces prévisions, la position biomédicale dominante, qui s’est mise en place dès les années 1970 et qui est constamment relayée par les médias, considère qu’il faut mettre davantage de moyens dans la recherche en neurosciences. Les causes neurobiologiques de la démence repérées, il s’agit alors d’élaborer des procédures neurobiologiques permettant de la diagnostiquer le plus tôt possible et d’identifier des traitements pharmacologiques à appliquer précocement pour en différer la survenue et, finalement, la guérir. Cette conception décrit le vieillissement cérébral et cognitif problématique à partir de catégories de maladies différentes. La maladie d’Alzheimer (MA) y est présentée comme une « épidémie », contre laquelle il faut se battre et qu’il convient de vaincre (guérir) à tout prix. Elle est régulièrement associée à un état catastrophique, décrit sous les termes de « perte d’identité », de « mort mentale », de « soi pétrifié », ou encore de « mort vivant ».

Dans ce contexte, des catégories diagnostiques correspondant à des états intermédiaires entre le vieillissement normal et la démence ont été élaborées. Historiquement, les personnes âgées manifestant des difficultés cognitives légères étaient considérées comme ayant des problèmes bénins, liés à l’âge. Cependant, l’approche biomédicale a conduit à considérer que ces personnes avaient une maladie ou, à tout le moins, un état susceptible de progresser vers une maladie démentielle. C’est ainsi que les concepts de « trouble cognitif léger » (mild cognitive impairment, ou MCI) et de « maladie d’Alzheimer préclinique » (sans symptome) ont été créés.

En parallèle, dès les années 1980, de nombreuses consultations-mémoire ont vu le jour et constitué une structure pivot de l’approche biomédicale de la démence. Leur but principal était de recruter des patients pour entrer dans des essais cliniques sur des médicaments « anti-alzheimer ». Elles ont permis d’accroître la consommation de ces produits qui ont fait l’objet d’une intense promotion indiquant qu’ils constituaient un traitement efficace, malgré l’absence de données convaincantes appuyant leur utilisation. Plus récemment, les consultations-mémoire ont eu pour objectif de diagnostiquer les personnes présentant un MCI et de leur prescrire ces médicaments en dépit de l’absence de données attestant de l’efficacité de ces substances chez ce type de personnes. Enfin, on voit maintenant apparaître, dans certaines consultations, une activité de diagnostic encore plus précoce visant à repérer, au moyen de biomarqueurs, des personnes présentant une MA asymptomatique. Ces biomarqueurs, obtenus par l’analyse du liquide céphalo-rachidien ou des techniques de neuro-imagerie, visent à détecter des caractéristiques neuropathologiques et des atteintes cérébrales considérées comme « typiques » de la maladie d’Alzheimer.

Le choix dominant de la médicalisation

L’approche biomédicale de la démence s’est trouvée ainsi renforcée avec, plus généralement, une médicalisation et une pathologisation croissantes du vieillissement cérébral et cognitif et la stigmatisation qui en découle. Différents constats empiriques et plusieurs études ont pourtant conduit à mettre en question les fondements de cette approche [1]. Tout d’abord, il existe de très grandes différences dans la nature des difficultés cognitives présentées par les personnes ayant reçu le diagnostic de MA. Ainsi, à part les déficits de mémoire (et parfois sans troubles importants de ce type), les personnes peuvent montrer une grande variété de difficultés cognitives (de perception du monde, de réalisation de gestes, d’organisation des actions, de langage, d’attention, etc.). En outre, l’évolution des difficultés cognitives varie très fortement d’une personne à l’autre et, chez bon nombre d’entre elles, la situation peut rester stable et évoluer très lentement pendant plusieurs années, voire s’améliorer, indépendamment de la prise de médicaments.

La maladie d’Alzheimer n’est pas non plus strictement associée à des changements spécifiques dans le cerveau. D’une part, on constate des modifications dans des régions du cerveau très variables selon les personnes. D’autre part, quand on examine le cerveau de personnes décédées ayant reçu de leur vivant un diagnostic de MA, on constate, chez bon nombre d’entre elles, divers types d’anomalies : pas uniquement celles considérées comme typiques (les plaques séniles et les dégénérescences neurofibrillaires), mais aussi de nombreuses autres anomalies, comme des lésions vasculaires variées, des corps de Lewy, etc.

La frontière entre le vieillissement dit « normal » et celui dit « maladif » n’est pas claire. Ainsi, on observe dans le cerveau de certaines personnes âgées qui n’ont pas présenté de difficultés cognitives importantes (pas de démence) un taux important des signes neuropathologiques considérés comme caractéristiques de la maladie d’Alzheimer. A l’inverse, un grand nombre de difficultés cognitives observées chez les personnes ayant reçu le diagnostic de MA sont de même nature que les difficultés cognitives rencontrées dans le vieillissement dit normal, mais plus importantes.

De nombreuses études ont relevé la faible validité prédictive du diagnostic de « trouble cognitif léger » pour la maladie d’Alzheimer ou d’autres types de démence. En fait, le devenir dominant des personnes ayant reçu ce diagnostic précoce n’est pas la démence, mais plutôt la stabilité, le retour à la normale, voire une amélioration. De nombreuses données ont également mis en question la validité diagnostique des biomarqueurs. Relevons aussi que l’on ne dispose aujourd’hui d’aucun médicament ayant une réelle efficacité sur l’autonomie et la qualité de vie des personnes ayant reçu un diagnostic de MA ou qui puisse entraver le développement de cet état.

Enfin, des données en nombre croissant montrent que la présence, plus ou moins importante, de difficultés cognitives chez les personnes âgées résulte de facteurs très divers, dont l’influence peut se manifester aux différents âges de la vie. Ces facteurs incluent l’activité physique, le niveau scolaire et socio-économique, les activités cognitivement stimulantes, le stress, le sentiment de solitude, les stéréotypes négatifs sur le vieillissement, les toxines environnementales, les facteurs de risque et troubles vasculaires, le diabète de type 2, etc.

Reconnaître les vulnérabilités de chaque personne

L’ensemble de ces constats conduit à défendre une autre approche du vieillissement cérébral et cognitif, qui réintègre ses manifestations plus ou moins problématiques dans le contexte plus général du vieillissement, sous l’influence de nombreux facteurs et mécanismes intervenant tout au long de la vie. Ce changement d’approche doit nous amener à ne plus considérer le monde comme étant divisé entre ceux qui ont une démence et ceux qui ne l’ont pas, mais plutôt à penser que nous partageons tous les vulnérabilités liées au vieillissement cérébral et cognitif. Cela pourrait contribuer à créer davantage d’unité entre les générations et à mettre en place des structures sociales dans lesquelles les personnes âgées, quels que soient leurs problèmes, peuvent trouver des buts, un rôle social valorisant, des relations intergénérationnelles, etc.

Cette conception conduit aussi à envisager autrement l’évaluation des difficultés cognitives et fonctionnelles des personnes âgées en intégrant la multitude des facteurs qui y contribuent. Elle devrait mener à un rééquilibrage des interventions, en faveur de la prévention (visant à différer ou réduire les expressions problématiques du vieillissement cérébral et cognitif), ainsi que des approches psychosociales individualisées, ayant pour but d’optimiser la qualité de vie et le bien-être.

S’affranchir de la médicalisation du vieillissement cérébral/cognitif, c’est aussi changer de culture dans les structures d’hébergement à long terme destinées aux personnes âgées, en passant de pratiques qui se focalisent sur les questions médicales, la sécurité, l’uniformité et les directives bureaucratiques, à une approche dirigée vers le résident en tant que personne singulière, vers la promotion de son bien-être et de sa qualité de vie.

Pour conclure, la démence peut être considérée tel un prisme au travers duquel nous pouvons voir plus clairement l’état de notre société et la nécessité de la faire évoluer. Elle nous conduit à envisager les similitudes entre la manière dont nous vivons (dans une société « démente ») et la façon dont la personne ayant reçu un diagnostic de démence – mais aussi toute autre personne vulnérable (jeune ou âgée) – tente de s’intégrer dans ce monde : un monde qui valorise l’efficacité, l’individualisme et l’acquisition incessante d’habiletés cognitives au détriment de la compassion, de la solidarité et de l’engagement social. Ainsi, défendre une autre manière de penser le vieillissement, c’est aussi s’engager pour un autre type de société, dans laquelle la vulnérabilité, la différence et la finitude ont toute leur place !

[1] Elles sont analysées dans : Van der Linden, M., & Juillerat Van der Linden, A.-C. (2014). Penser autrement le vieillissement. Bruxelles : Mardaga. Présentation sur REISO.

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