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Alors qu’un répertoire des organisations qui œuvrent en faveur de l’enfance a été lancé le 1er février en Valais, le Canton vient, de son côté, de publier un annuaire, regroupant infos et contacts, consacré aux Générations 60+.

We love spending time with them. two sisters spending time with their grandparents at home© DepositphotosLa Coordination cantonale en faveur des Générations 60+ du canton du Valais lance un site internet qui vise à regrouper les différentes thématiques, les informations de base et une liste de personnes de contact concernant les personnes de plus de 60 ans. Il est destiné aux seniors, à leurs proches ou encore aux professionnel·les.

Cette plateforme ambitionne d’apporter davantage de renseignements et de manière plus précoce sur les questions sociales et de santé que les seniors pourraient se poser. En leur permettant d’accéder à une meilleure connaissance des outils existants, l’objectif est d’améliorer leur qualité de vie, de favoriser leur maintien à domicile, ainsi que de diminuer le non-recours ou le recours tardif aux prestations disponibles.

La liste des thématiques et sous-thèmes retenus sera adaptée en fonction des besoins et de l’offre de prestations. Pour l’heure, celle-ci porte sur : avant la retraite, conseil social et assurances sociales, santé, loisirs, formation, vie quotidienne, soutien pour la vie à domicile, séjour en EMS ou encore fin de vie et successions. Chacune des rubriques donne les informations de base et fournit les contacts des partenaires institutionnels concernés sur l’ensemble du territoire valaisan.

Dans un deuxième temps, une brochure sera produite pour répondre également aux besoins des personnes qui n’ont pas accès au numérique.

Par ailleurs, un volet du site internet est consacré aux communes. Elles y trouvent des informations sur les mesures qui peuvent être mises en place sur leur territoire et les outils existants pour les soutenir dans l’élaboration d’une politique en faveur des seniors.

Réseau des organisations actives pour l’enfance et les familles

Le 1er février, c’est un site compilant l’ensemble des organisations œuvrant en faveur de l’enfance et de la famille en Valais qui a été publié. Initiative de deux fondations privées, réalisé en collaboration avec la HES-SO Valais, la Haute école pédagogique du Valais, l’Institut international des droits de l’enfant et le Centre interfacultaire en droits de l’enfant de l’Université de Genève, « ce répertoire donne un état descriptif de la situation et montre les domaines qui sont couverts et ceux qui ne le sont pas, ou de manière lacunaire ». Les 270 entités figurant dans cette plateforme sont regroupées en six thématiques : prévention, protection de l’enfant et de la famille, développement et éducation, santé, handicap et besoins particuliers, autres. Environ 180 sont basées dans le Valais romand, 50 dans le Haut-Valais, et le solde hors canton tout en œuvrant au bénéfice de l’enfance en Valais.

(CROC/communiqués de presse)

Voir le site d’informations concernant les seniors en Valais

Voir la plateforme « Pour l’enfance en Valais »

Le travail social hors murs peut-il jouer un rôle en matière d’insertion socioprofessionnelle ? Les contacts établis dans la rue permettent-ils un accompagnement efficace ? Exemple à Vevey.

Par Delia Guggenbühl Adam, Insertion Vaud

insertion commence rue 400© Marcino / Pixabay

Toutes les ruelles, passages et recoins de Vevey sont connus par l’équipe des travailleurs et travailleuses sociales de proximité de Ginkgo. Active dans l’insertion socioprofessionnelle depuis plus de 20 ans, cette structure de la ville compte plusieurs cordes à son arc pour soutenir les jeunes de 12 à 25 ans de la région : des activités communautaires (repas, activités sportives et socioculturelles), une permanence sociale ou des mesures d’insertion socioprofessionnelle et de prévention. Ginko recourt également au travail social hors murs (TSHM), un outil moins connu ou moins utilisé dans le domaine de l’insertion. Plus souvent en effet, les mesures d’insertion socioprofessionnelle accueillent les participant·es dans leurs locaux ou organisent des activités à l’extérieur. Mais peu d’organismes prestataires vont à la rencontre des jeunes dans la rue, en allant là où elles·ils se trouvent.

A Vevey, les trois travailleurs et travailleuses sociales de proximité se partagent dix heures de TSHM par semaine. Ces sorties dans le centre-ville, à pied uniquement, permettent de prendre la température de la ville, d’aller à la rencontre des jeunes, souvent en groupes, mais aussi seul·es parfois. Cette présence ouvre un espace de transition entre la rue et l’école, la rue et l’insertion sociale, la rue et l’insertion professionnelle.

Le rôle du TSHM est de faire de la prévention, de la médiation, de l’intervention si besoin, mais pas de se substituer à la police. « On est un peu comme des super citoyens », explique Nicolas, l’un des trois membres de l’équipe. « Mais on ne fait rien d’extraordinaire, on déambule dans la rue, on sent ce qui se passe, on intervient si besoin, comme le ferait normalement tout bon citoyen. » Ginkgo a développé une très bonne collaboration avec l’école, d’autres acteurs du réseau, mais aussi avec la police veveysane, qui les appelle parfois pour des situations où le travail social peut jouer un rôle avant une intervention policière. En revanche, si cela dégénère, ce sont les forces de l’ordre qui interviennent, pas eux. L’équipe n’est pas là non plus pour agir sur tous les problèmes qu’il peut y avoir dans la ville, par exemple le deal de rue ou les tags.

Le ressenti, un outil essentiel

Concernant leur manière de travailler, « il n’y a pas de recette miracle, il y a plusieurs styles et on fait beaucoup en fonction du feeling du moment. Parfois, on va plus au contact, parfois on est plus en retrait, plus en observation. Il y a plusieurs manières de faire qui dépendent aussi du contexte, par exemple s’il fait jour ou nuit », relate Cédric, un autre TSHM de la structure. Le contact avec les jeunes est adapté au cas par cas et le ressenti a son importance également. « Parfois, on se plante aussi », ajoute Nicolas. A Ginkgo, l’approche est généralement plutôt discrète, quelques fois un simple bonjour ou un signe de tête suffit.

La force de leur dispositif réside dans le volet insertion qui complète le travail social hors murs, car « de nombreuses personnes sont perdues pour l’insertion professionnelle, elles n’ont pas les codes », estime Nicolas. Aborder les jeunes marginalisé·es dans la rue et leur proposer d’emblée la participation à une mesure d’insertion est trop brutal. La technique des TSHM consiste d’abord à se faire connaître, établir un dialogue, montrer qu’elles·ils sont là en cas de besoin et informer les jeunes qu’elles·ils peuvent passer à Ginkgo.

La création d’un lien de confiance prend parfois du temps, c’est un travail de longue haleine. Un argument qui marche bien, « le produit d’appel », comme le nomme l’équipe, consiste à proposer uniquement une aide pour un CV et une lettre de motivation. Ce soutien n’est pas stigmatisant, tout le monde pouvant avoir besoin d’aide pour préparer un dossier de postulation. Si la ou le jeune vient jusque dans les locaux, les travailleurs et travailleuses sociales peuvent ensuite proposer, en fonction des besoins, un accompagnement plus complet pour la recherche d’un stage, d’un apprentissage ou d’un emploi, ou une aide pour d’autres problématiques.

Le sur-mesure permet de s’adapter à chaque situation. Les suivis des jeunes sont variables, certaines personnes viennent juste une fois ou deux, alors que d’autres fréquentent la structure durant une dizaine d’années, de l’école jusqu’à l’entrée dans une vie d’adulte stabilisée. Le bouche-à-oreille fonctionne très bien dans la petite ville de Vevey, la plupart des jeunes connaissent Ginkgo, qui voit défiler des fratries entières. Savoir que l’on peut passer à la permanence sociale pour demander une aide ou un conseil est rassurant.

Le profil des jeunes

L’équipe constate une grande disparité des profils des jeunes qu’elle côtoie dans la rue. Tout le spectre est représenté : des jeunes inséré·es qui se retrouvent simplement après le travail mais qui dérangent le quartier, jusqu’aux jeunes qui cumulent de multiples problématiques (problèmes de comportement, d’addictions, familiaux, etc.). Ils et elles rencontrent aussi les personnes qui arrivent d’autres pays et qui ont besoin avant tout de socialisation. L’augmentation de la solitude et de la dépression est un constat partagé par l’ensemble de l’équipe. Nicolas émet l’hypothèse que l’origine se trouve en grande partie dans le smartphone et les réseaux sociaux. L’équipe note qu’avec l’arrivée de ces technologies, les jeunes discutent moins ensemble, se retrouvent moins « entre potes » et restent plus souvent isolé·es chez eux. Les réseaux sociaux ont tendance à faire penser que la vie des autres est bien plus intéressante et plus fun.

Pour contrer cette tendance à l’isolement, Marco Pavarini, responsable de la structure depuis 2008, explique que l’équipe propose des animations de groupe pour les jeunes, comme une après-midi sportive, un atelier philosophie ou une matinée de travail sur des projets. « Ça prend bien », ajoute Marco. Le groupe permet de prendre conscience qu’on n’est pas tout·e seul·e avec ses galères, et il se crée de belles synergies entre les jeunes. Nicolas donne l’exemple d’une récente sortie au Salon des métiers. « Plusieurs jeunes ont râlé qu’ils connaissaient déjà, mais ils sont quand même venus ». Sur place, l’effet du groupe aidant, certain·es qui se montraient réticent·es se sont mis·es à s’intéresser à des métiers et à faire des tests d’aptitude. D’autres conseillaient leurs camarades sur les métiers dans lesquels ils les verraient bien évoluer.

Un accès plus difficile aux filles

Les travailleurs et travailleuses sociales de proximité constatent depuis longtemps qu’il y a très peu de filles dans l’espace public, territoire majoritairement occupé par les garçons. Parfois, elles·ils rencontrent des groupes de filles qui font la fête et boivent de l’alcool, mais c’est rare. Il s’avère donc plus difficile pour les TSHM d’entrer en contact avec des filles qui auraient besoin d’une main tendue. Heureusement, grâce à l’efficacité du bouche-à-oreille, c’est plutôt elles qui rejoignent les locaux, parfois directement ou parfois avec le prétexte d’accompagner quelqu’un·e. Chez elles, selon les cas, les problématiques peuvent être lourdes et pas forcément abordées spontanément.

Une immersion dans le TSHM

En cette fin de journée de novembre 2023, la température avoisine le zéro degré et une petite bise gèle le visage de Nicolas dans la nuit tombante. Le TSHM débute son tour dans les rues de Vevey, tout semble calme. Il rencontre néanmoins un groupe de quatre jeunes hommes d’environ 15 à 17 ans, les salue et leur parle quelques minutes pour savoir comment ils vont et s’ils n’ont pas trop froid. Un des jeunes est venu le jour-même à la permanence pour des démarches d’insertion professionnelle et ne reconnait pas tout de suite le travailleur social sous son bonnet. Pas de souci pour ces jeunes qui discutent tranquillement.

Nicolas poursuit son chemin, déambule par différents endroits et recoins appréciés des groupes de jeunes où les situations s’échauffent parfois. Fort de ses quinze années d’expérience professionnelle dans ce poste, le travailleur social connait Vevey comme sa poche et a rarement besoin de se présenter : les jeunes savent qui il est. Selon lui, une expérience d’au moins trois ans est nécessaire pour se faire connaître auprès de cette population et pour acquérir leur confiance. L’expérience acquise au fil des ans permet aussi de trouver la bonne distance à avoir avec les personnes rencontrées, de savoir quelles sont les méthodes d’approche et d’intervention qui fonctionnent le mieux et de sentir si une situation peut devenir dangereuse. Nicolas estime que le TSHM est une vocation.

Une approche proactive qui fonctionne

La grande force du travail social hors murs réside dans la prévention. Cette proactivité permet d’entrer en contact avec des jeunes parfois même avant que leur situation personnelle ne dégénère et qu’une marginalisation ne s’opère. Des solutions sur mesure leur sont proposées afin qu’elles·ils aient la chance de prendre le train en marche, de retrouver une confiance en elles/eux-mêmes et de réaliser leur potentiel.

Les récompenses pour l’équipe des TSHM ? Recroiser au hasard d’ancien·nes participant·es, devenu·es des adultes bien dans leurs baskets, poussant parfois une poussette, avec le sentiment de se donner des nouvelles d’égal·e à égal·e.


 

Lire également :

Dans le canton de Vaud, une campagne vise à mieux informer les femmes migrantes victimes de violence domestique des ressources à disposition. Des supports d’information seront distribués aux professionnel·les.

compagne communication violence domestique femmes migrantes reiso 170© Etat de VaudLe Bureau de l’égalité entre les femmes et les hommes du canton de Vaud lance une campagne de communication portant sur les prestations destinées aux personnes migrantes victimes de violence domestique. Celles-ci disposent de ressources informationnelles restreintes et d’un réseau de contacts souvent peu étendu. Différents supports d’information seront diffusés auprès des professionnel·les en contact avec les personnes migrantes, et placés dans des lieux à grande fréquentation.

Indépendamment de leur statut de séjour, les femmes victimes de violence domestique peuvent bénéficier, pour elles et leurs enfants, d’un hébergement d’urgence allant jusqu’à 60 jours au Centre MalleyPrairie, de conseils et d’un accompagnement par le Centre social protestant, ainsi que d’informations auprès du Service de la population. En effet, leurs craintes de s’adresser à un service ne doivent pas les conduire à continuer à endurer cette violence, qui peut mettre leur vie et celle de leurs enfants en danger.

Ces actions s’inscrivent dans le cadre de l’application de la Loi vaudoise d’organisation de la prévention et de la lutte contre la violence domestique et dans la mise en œuvre des exigences de la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique (dite Convention d’Istanbul). Le Conseil d’État s’engage, en partenariat avec les institutions de terrain, à renforcer et faire connaître les prestations d’aide aux victimes depuis de nombreuses années. Cette campagne est un jalon supplémentaire pour faire en sorte de briser leur isolement et leur venir en aide efficacement.

(Source : communiqué de presse)

Lien vers la page de la campagne permettant de commander le matériel de communication

Informations complémentaires sur les violences domestiques

Créé en France par plusieurs associations engagées dans la prévention et les addictions, un guide vise à compléter la «boîte à outils» des professionnel·les qui travaillent avec des personnes âgées consommant de l’alcool.

guide intervenir personnes agees consommatrices alcool rdr reiso 170Démystifier les préjugés sur la consommation d'alcool et informer sur les réactions à éviter ; Repérer les risques prioritaires ; Adopter les bons réflexes pour sécuriser une situation ; Identifier les ressources et les dispositifs en addictologie sur lesquels s'appuyer : ces quatre objectifs sont ceux visés par la publication du manuel « Intervention auprès des personnes âgées consommatrices d'alcool dans une perspective de Réduction Des Risques (RDR) ». Si le quatrième but ne s’avère que peu utile au lectorat suisse (les ressources figurant dans le guide sont logiquement situées en France), le reste du contenu représente des informations pertinentes également pour les professionnel·les suisses romand·es.

Non voué à se « substituer » aux spécialistes en addictologie, ce document vise à permettre aux professionnel·les qui interagissent quotidiennement avec les personnes âgées et/ou leurs proches aidant·es de se familiariser avec les outils suggérés, dans le cadre d'une approche de réduction des risques liés à l'alcool et d'amélioration de la qualité de vie des personnes âgées.

Créé en collaboration entre diverses associations actives dans le domaine de la vieillesse et de la prévention, ce manuel se base sur les nouvelles recommandations de la Haute autorité santé « Prévention des addictions et Réduction des Risques et des Dommages (RdRD) dans les ESSMS », publiées en novembre 2022.

En complément au manuel, une « fiche repère pour l'intervention auprès des personnes consommatrices d'alcool dans une logique de réduction des risques » est également disponible, offrant une sensibilisation à l'approche générale de réduction des risques liés à l'absorption excessive de boissons alcoolisées.

(CROC)

Voir le manuel « Intervention auprès des personnes âgées consommatrices d'alcool dans une perspective de Réduction Des Risques (RDR) ». France, 2023,19 pages

Voir la fiche repère pour l'intervention auprès des personnes consommatrices d'alcool dans une logique de réduction des risques

La commission de la santé du Conseil national aimerait ajouter des exceptions à la loi d’application de l’initiative visant à protéger les enfants de la publicité pour le tabac, acceptée en 2022. Les milieux de la prévention se mobilisent.

enfant sans tabac publicite promotion prevention parrainage deni democratie 400© VisualArtStudio / Adobe StockLe 13 février 2022, le peuple et les cantons suisses donnent un mandat clair au Parlement suisse, en acceptant l’initiative populaire « Enfants sans tabac » : les mineur·es doivent être protégé·es de toute forme de publicité pour la cigarette et ses dérivés. Deux ans plus tard, des voix s’élèvent, dont celle du comité de l’initiative, pour dénoncer les exceptions que la Commission de la santé du Conseil national tente d’ajouter à la loi d’application de ce texte, notamment en matière de parrainage ou de promotion du tabac dans l’espace public.

Selon Thomas Gächter, professeur de droit à l’Université de Zurich interrogé par le comité d’initiative [1], la version proposée de la loi révisée sur les produits du tabac s’avère inconstitutionnelle en plusieurs points : « Si le Conseil national se rallie aux propositions de sa commission, il y aurait même plus de publicité pour le tabac autorisée que dans la loi sur les produits du tabac de 2021, et ce, en raison des exceptions au niveau de la promotion et du parrainage ». Et il ajoute : « La proposition de mise en œuvre n’est tout simplement pas conforme à la Constitution en plusieurs points ».

Fortement engagé en faveur de la santé publique, l’ancien médecin cantonal vaudois Jean Martin élève la voix dans une tribune [2] récemment publiée dans la Revue médicale suisse. Interview.

Martin Jean(REISO) Jean Martin, vous vous engagez toujours vivement dans les sujets que vous soutenez, à l’image de l’énergie déployée il y a deux ans pour défendre l’initiative « Enfants sans tabac » ; on sent dans les mots de votre tribune colère et lassitude contre les parlementaires...

(Jean Martin) Toute ma carrière, je peux le dire sans vanité, a été consacrée à œuvrer pour la santé publique, la santé de la collectivité. La promotion de la santé (encourager les modes de vie sains) et la prévention en sont des composantes essentielles. Or le tabagisme est la première cause de maladies évitables chez les adultes. C’est un véritable fléau, qui entraîne des cancers de plusieurs organes, de très grosses difficultés respiratoires, et j’en passe. Si personne ne peut interdire la consommation de tabac — malgré l’effet de drogue de la nicotine et ceux cancérigènes du goudron de cigarette —, il importe d’éviter de « contaminer » les enfants et les jeunes, de les sensibiliser aux conséquences désastreuses du tabagisme. Mais contre ces efforts déployés en matière de santé publique, l’industrie du tabac est vent debout, depuis des décennies.

Ce qui est particulièrement frustrant c’est que, alors que les initiatives populaires — nécessitant la double majorité du peuple et des cantons pour passer la rampe, rappelons-le — rencontrent rarement le succès, « Enfants sans tabac » a été accepté il y a deux ans, et que, dans les débats sur la loi d’application, les « marchands de maladies » que sont les cigarettiers font le forcing pour contourner l’interdiction de publicité inscrite dans la Constitution.

Selon l’OFSP, « le tabagisme grève l’économie suisse de près de 3,9 milliards de francs chaque année » [3]. Comment expliquer que ce montant élevé, documenté, n’encourage pas davantage une protection rapide et efficace des enfants de la publicité contre les produits du tabac ?

Le facteur principal est de nature politique, à savoir l’influence beaucoup trop forte des lobbyistes et autres personnes proches de l’industrie du tabac qui soumettent les parlementaires à des feux roulants d’arguments fallacieux, notamment en semant le doute sur les dégâts liés au tabac... Et pour sauvegarder son marché, elle est prête à dépenser des millions.

La très regrettable réalité, c’est que la Suisse officielle, y compris le Parlement, est quasiment à la botte de cette industrie. Ce qui fait que même l’argument fort des milliards des coûts liés au tabac ne fait pas le poids...

Il est primordial que les enfants soient sensibilisés aux conséquences néfastes du tabagisme

Quel est, selon vous, le moyen le plus efficace de protéger les enfants et les jeunes des méfaits et risques d’addiction au tabac ?

Cela n’est pas hyper valorisant pour celles et ceux qui, comme moi, s’engagent pour plus d’éducation pour la santé, notamment à l’école.... Mais on sait que, parmi les mesures les plus efficaces, il y a d’une part, le coût du produit (la consommation baisse quand le prix monte), et d’autre part les limites à la publicité — publicité qui introduit des images que l’on a envie de suivre, des « modèles » délétères... Alors évidemment, l’industrie s’oppose vigoureusement contre les limites à la publicité et les augmentations de taxes.

Attention, ces constats ne signifient pas qu’il faille délaisser l'éducation pour la santé à l’école, bien au contraire ! Je le redis encore une fois : il est primordial que les enfants soient sensibilisés aux conséquences néfastes du tabagisme.

Les décès liés à la consommation des produits du tabac touchent annuellement près de 10'000 personnes en Suisse [4]. Quel est, selon vous, le rôle des professionnel·les de la santé et du travail social en matière de prévention ?

Aujourd’hui, on doit attendre de tou·tes les professionnel·les de santé et du travail social qu’ils et elles s’engagent fermement dans leur pratique pour limiter la consommation de tabac, sans exception. J’ose à peine le dire, il y a 40 ans, je me souviens bien d’un pneumologue (!) qui était un fumeur à la chaîne, parfois devant ses patient·es. Le contre-exemple absolu ! Les médecins et autres professionnel·les de la santé et du social doivent saisir toutes les occasions d’en parler à leur consultation [5], comme partie du traitement (chez les personnes souffrant de maladies liées au tabac) et dans un sens préventif chez les autres.

(Propos recueillis par Céline Rochat)

[1] https://www.enfantssanstabac.ch/actualites/la-mise-en-uvre-de-linitiative-populaire-enfants-sans-ta-bac-est-en-danger/

[2] Jean Martin, « Avons-nous donné les clés à des irresponsables », Revue médicale suisse, 21 février 2024.

[3] OFSP, « Faits et chiffres : tabac », consulté le 23.02.2024

[4] Ibid.

[5] Afin de soutenir les professionnel·les dans leur travail d’information et de prévention, Unisanté dispose de documentations. Voir le film de prévention destiné aux professionnel·les « Parler du tabac avec ses patients et bénéficiaires »

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